Au-delà du taux de chômage. Comparaison internationale depuis la crise. OFCE. Mai 2017.
Pour compléter notre précédente actualité (Une photographie du marché du travail en 2016, Insee), nous vous signalons cette publication de l'OFCE qui cherche à expliquer les différentiels d'évolution des taux de chômage depuis la crise de six grands pays de l'OCDE (France, Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni, États-Unis), à partir de l'observation de l'évolution des comportements d'activité et des caractéristiques des emplois (temps partiel subi notamment).
Bruno Ducoudré et Pierre Madec analysent d'abord l'effet des variations des taux d'activité et des durées du travail sur le chômage. Il ressort que la plupart des pays (sauf les États-Unis) ont vu leur population active et leurs taux d'activité augmenter, en raison notamment des réformes des retraites menées. Dans un contexte d'absence ou de faible création d'emploi, comme en Espagne, en Italie et en France, cela a eu pour effet d'accroître le taux de chômage. En revanche, la réduction de la durée effective de travail dans les pays européens (par le recours au chômage partiel, au temps partiel, à la réduction des heures supplémentaires, etc.) a atténué la hausse du chômage après la crise. Cet effet a été particulièrement marqué en Allemagne et en Italie. Au final, sans les ajustements des taux d'activité et des durées du travail réalisés depuis 2007, l'Allemagne et les États-Unis auraient un taux de chômage un peu plus élévé, l'Espagne et le Royaume-Uni un taux de chômage plus faible, et, en France et en Italie, il serait proche de celui observé fin 2016.
Les deux chercheurs considèrent ensuite les évolutions du sous emploi (actifs occupés à temps partiel souhaitant travailler davatage) et du «halo» du chômage (inactifs déclarant vouloir travailler, non comptabilisés comme chômeurs au sens du BIT). L'addition de ce halo, du sous emploi et du chômage au sens du BIT permet d'avoir une mesure élargie du chômage. La situation du marché du travail apparaît encore plus dégradée en Italie et en France, entre 2008 et 2016, si l'on tient compte du halo et du sous-emploi et pas uniquement du chômage au sens strict : les deux composantes ont augmenté significativement. De même, en Espagne, la baisse du taux de chômage au sens strict entre 2011 et 2016 s'accompagne d'une augmentation du sous-emploi. Ainsi, peut-on réellement parler d'amélioration de la situation sur le marché du travail lorsque le taux de chômage, pris au sens large, atteint 29 % en 2016 dans ce pays, soit 11 points de plus qu'en 2008 !
Blog de l'OFCE, billet du 16 mai 2017.
par Bruno Ducoudré et Pierre Madec.
Résumé
Depuis 2008, les évolutions de l'emploi au sein des pays de l'OCDE ont été très différentes. Les États-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont retrouvé des taux de chômage proches de ceux observés avant le début de la crise, tandis que les taux de chômage français, italien et plus encore espagnol sont encore au-dessus des niveaux d'avant-crise. L'évolution du chômage résulte de l'écart entre l'évolution de la population active et l'évolution de l'emploi. Une amélioration sur le front du chômage peut dès lors masquer des évolutions moins favorables sur le marché du travail, en termes de comportements d'activité (évolution du taux d'activité et du « halo du chômage »), ou de progression de l'emploi précaire (temps partiel subi, …). Dans ce billet, nous revenons sur la contribution de l'évolution des taux d'activité et des durées du travail à l'évolution des taux de chômage, et sur une mesure élargie du taux de chômage qui englobe le «halo du chômage» et le temps partiel subi.
Source : Blog de l'OFCE, 16 mai 2017
À propos de l'état du marché du travail en France, l'OFCE a également publié :
"Début de quinquennat : emploi dynamique, chômage élevé", Département Analyse et Prévision, 24 mai 2017.