Biodiversité en danger : quelle réponse économique ? CAE. Septembre 2020.
Note du conseil d'analyse économique, n° 59, septembre 2020.
par Dominique Bureau, Jean-Christophe Bureau et Katheline Schubert.
Documents associés :
Mesurer la biodiversité, Focus n° 046‐2020.
Compensation écologique : à la demande ou par le développement d'une offre ? Focus n° 047‐2020.
Plan de relance et biodiversité, Focus n° 048‐2020.
L'effondrement de la biodiversité est sans appel, en France comme dans le monde et les politiques de protection ont des résultats décevants. Les auteurs de cette Note du CAE s'appuient sur les diagnostics les plus récents pour proposer une approche économique intégrant la production de valeur de la biodiversité et des instruments d'intervention réglementaires et fiscaux efficaces. Ils recommandent également de saisir l'opportunité du plan de relance suite au Covid‐19 pour investir dans des actions d'aménagement favorables à la biodiversité et génératrices de co‐bénéfices, et de s'appuyer sur une stratégie nationale plus unifiée et déclinée aux différents échelons territoriaux. Ils préconisent enfin de mieux réguler les échanges commerciaux notamment en renforçant les inspections pour limiter les importations d'espèces invasives et le contrôle des clauses environnementales liées à la biodiversité dans les accords commerciaux préférentiels.
Résumé
Les indicateurs convergent sur le fait que la biodiversité s'effondre à l'échelle mondiale et que le phénomène s'accélère au cours de la période récente. Ce constat vaut aussi pour la France. Or, la biodiversité est le garant de biens et services irremplaçables, préservant la capacité de la nature à fournir nourriture, matières premières, médicaments, à nous protéger contre les risques naturels, à stocker du carbone, recycler des déchets, et à contribuer à la qualité de notre cadre de vie. Les principaux moteurs de la perte de biodiversité sont désormais bien identifiés : en France l'artificialisation des sols, la fragmentation des milieux naturels, des pratiques agricoles intensives, l'assèchement des zones humides sont des causes importantes.
Face à des enjeux trop longtemps sous-estimés, les politiques de préservation de la biodiversité ont des résultats décevants. Elles manquent de cohérence et s'appuient sur une protection trop fragmentée, souvent davantage centrée sur l'espèce ou l'animal que sur les écosystèmes. Cette Note montre que des leviers existent, pour mieux utiliser les budgets, pour faire gagner en cohérence et en ambition les réglementations, et, surtout, pour fournir des incitations efficaces à la protection.
La vitesse de dégradation des écosystèmes ne laisse plus le temps de l'inaction. Nous recommandons de saisir l'opportunité du plan de relance suite à la crise du Covid-19 pour investir dans des actions d'aménagement favorables à la biodiversité. Il faut aussi développer une stratégie nationale plus unifiée et déclinée aux différents échelons territoriaux en articulant plus efficacement les missions de l'Office français de la biodiversité (OFB), des structures régionales et des intercommunalités.
En parallèle, nous proposons de mobiliser une panoplie renouvelée d'instruments inspirés par une démarche économique permettant de prendre en compte les externalités positives de la biodiversité. Ainsi, nous recommandons une réforme de la séquence « éviter, réduire, compenser » actuellement en vigueur dans les grands projets d'aménagement, et un accès plus conditionnel aux subventions publiques. Les dispositifs fiscaux doivent être revus pour réduire les incitations à l'artificialisation des sols, due notamment à une excessive imposition des espaces non bâtis par rapport à leur valeur d'usage et à la non-prise en compte du coût de l'artificialisation dans les projets d'aménagement. Les aides agricoles doivent être réorientées vers des contrats de conservation rémunérateurs, visant un engagement de long terme en faveur de la biodiversité. Concernant les échanges extérieurs, nous recommandons de renforcer les inspections relatives au tourisme et au commerce pour limiter l'importation d'espèces invasives et de pathogènes, de rendre plus opérationnelles les clauses environnementales liées à la biodiversité des accords commerciaux préférentiels et d'encourager à des politiques coordonnées. Mais pour éviter que des actions en faveur de la biodiversité ne déplacent le problème à l'étranger, l'ensemble des mesures prises au niveau local doit s'intégrer dans un cadre global d'une modification des modes de consommation, en particulier de produits animaux, et de réduction des gaspillages.
Sommaire
- La biodiversité : un effondrement bien réel
- Les enjeux d'une approche économique
- Pour des politiques de protection renforcées et efficaces
- Intégrer la biodiversité dans les politiques publiques : quelques domaines clés
Encadrés :
- Biodiversité et pandémie
- Protéger la biodiversité : des exemples de succès
- Chasse et biodiversité
- Les paiements pour services environnementaux et la biodiversité
Source : Focus n° 046‐2020.
Source : Focus n° 048‐2020.