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Les enjeux économiques de l'intelligence artificielle. Direction Générale du Trésor. Avril 2024.

Publié le 29/04/2024

Trésor-Eco n° 341, avril 2024.

Version téléchargeable.

Par Léo Besson, Arthur Dozias, Clémence Faivre, Charlotte Gallezot, Joceran Gouy-Waz, Basile Vidalenc.

Résumé

L'intelligence artificielle (IA) désigne l'ensemble des techniques permettant à des machines de simuler l'intelligence humaine. Son développement est une révolution technologique qui, à l'instar des révolutions technologiques précédentes, pourrait générer d'importants bouleversements économiques. Si les travaux de quantification des effets de l'IA sont encore exploratoires, ils permettent d'en appréhender les contours.

Au niveau macroéconomique, il est trop tôt pour distinguer empiriquement un effet sur la croissance, mais de premières études microéconomiques suggèrent des effets positifs significatifs de certaines applications spécifiques de l'IA sur la productivité individuelle des travailleurs. À poste donné, ces gains touchent en particulier les travailleurs les moins productifs, entraînant un rattrapage vis-à-vis des plus productifs. En revanche, les effets de l'IA mesurés sur la productivité des entreprises sont pour le moment modestes. Ceci peut s'expliquer par une adoption encore limitée et inégale au sein des entreprises, plus forte pour les grandes entreprises et celles du numérique.

Les effets théoriques de l'IA sur l'emploi sont incertains. À court terme, ils dépendront de la vitesse de déploiement de l'IA (qui dépend elle-même de la progression de l'IA et de l'évolution de ses coûts de développement pour les entreprises), de l'évolution de certains métiers vers des tâches qui lui sont complémentaires et de la réallocation de la main d'œuvre vers les métiers en croissance. À long terme, les effets de l'IA sur la demande de travail agrégée dépendront de mécanismes similaires à ceux qui furent observés lors des précédentes révolutions technologiques, en particulier de l'efficacité et des délais du mécanisme schumpétérien de « destruction créatrice ».

Par ailleurs, les premières estimations empiriques s'accordent sur le fait que les tâches et métiers touchés par l'IA ne seraient pas les mêmes que ceux qui étaient concernés par les précédentes révolutions technologiques. L'IA concernerait davantage les professions qualifiées, du fait de sa capacité à prendre en charge des tâches abstraites et non-routinières, alors que les vagues précédentes de mécanisation et d'informatisation avaient respectivement concerné les emplois non qualifiés et les professions intermédiaires. Les professions qualifiées pourraient toutefois, dans le même temps, être les plus susceptibles de tirer profit des gains de productivité permis par l'adoption de l'IA. 

Ces différents constats appellent à renforcer les formations en sciences dans l'enseignement primaire et secondaire et en IA dans l'enseignement supérieur, à cibler la formation continue sur les métiers en transformation, et à lever certains freins à la diffusion de l'intelligence artificielle notamment via une politique de concurrence adaptée à ses particularités. 

Comme ce fut le cas pour les technologies de l'information et de la communication (TIC), l'IA risque de contribuer à l'augmentation de la concentration industrielle et à l'essor d'entreprises déjà « superstars », souvent non européennes. Ces grandes entreprises disposent en effet d'une avance conséquente en ce qui concerne l'accès aux ressources nécessaires au développement de ces modèles d'IA, ce qui pourrait limiter la diffusion de la technologie et les gains économiques associés, qui seraient alors captés par ces seules grandes entreprises. Face à ces risques, la mobilisation des outils de la politique de la concurrence (abus de position dominante, contrôle des concentrations) aura un rôle essentiel. Toutefois, le caractère émergent et évolutif du marché, ainsi que les gains économiques pour le consommateur associés aux effets de réseaux et aux économies d'échelle, complexifient l'analyse coût-bénéfice. Les pouvoirs publics devront ainsi faire face à un arbitrage entre les gains immédiats pour les consommateurs et une dynamique d'innovation à long terme. 

Sommaire

  • Un effet de l'intelligence artificielle sur la croissance encore peu visible
  • Des effets positifs sur la productivité individuelle de certains travailleurs
  • Un développement de l'IA touchant les métiers les plus qualifiés

Encadré 1 : La main d'œuvre et les compétences dans le secteur de l'IA

Encadré 2 : Utilisation de l'IA et bien-être au travail

  • Un potentiel qui dépendra des mesures affectant le déploiement de l'IA et des politiques de formation, initiale et continue 

Cliquez sur les images pour agrandir les figures.

Source : Lettre Trésor-Eco n° 341, avril 2024.

Pour aller plus loin

Verdugo G. (2020), « La polarisation des marchés du travail », SES-ENS