Quelle trajectoire pour les finances publiques françaises ? CAE. Juillet 2024.
Note du CAE n° 82, juillet 2024.
Par Adrien Auclert, Thomas Philippon et Xavier Ragot.
Résumé
Les finances publiques françaises se sont fortement dégradées ces dernières années, du fait de la crise sanitaire, des boucliers tarifaires mis en place pour amortir les effets de la hausse des prix de l'énergie, mais aussi de baisses d'impôts non financées. En 2023, la dette publique a atteint environ 110 points de PIB et le déficit public 5,5 points de PIB.
Les futurs gouvernements feront face à un double défi. D'une part, pour garantir la soutenabilité de la dette, continuer à se financer à des taux d'intérêt bas et respecter ses engagements européens, la France doit réduire son déficit public dans les années à venir. D'autre part, pour protéger la croissance et éviter une hausse du chômage, elle doit éviter une consolidation trop rapide et faire des choix judicieux de pilotage. Cette Note décrit les stratégies de finances publiques compatibles avec ces contraintes, en tenant compte des vents contraires liés au vieillissement démographique, de la nécessaire transition énergétique et de la recrudescence des risques géopolitiques.
La Note documente d'abord l'évolution historique de la dette publique française qui est passée d'environ 20 points de PIB dans les années 1970 à 110 points actuellement. Cette hausse reflète principalement l'accumulation des déficits primaires, c'est-à-dire hors charges d'intérêt de l'État. De fait, les taux de croissance et les taux d'intérêt du financement de la dette se sont approximativement neutralisés à long terme. Ce point est doublement important. Il signifie que la France garde le contrôle de son endettement, mais aussi qu'elle ne peut pas compter sur des conditions macroéconomiques favorables pour diminuer mécaniquement son ratio de dette sur PIB. Une réduction de la dette devra donc passer par un dégagement de surplus primaires. La Note préconise une cible de surplus primaire d'environ 1 point de PIB à moyen terme afin de stabiliser la dette tout en gardant des marges de manœuvre pour faire face aux crises futures.
La Note se penche ensuite sur la trajectoire de moyen terme permettant d'atteindre cette situation stabilisée. Une consolidation trop rapide risque de peser sur la croissance. Une consolidation trop lente augmentera la dette avec un risque pour le coût de financement, l'investissement et la crédibilité de la France. La Note propose un ajustement modéré mais soutenu, impliquant une réduction du déficit primaire d'environ 4 points de PIB, soit 112 milliards d'euros, étalée sur 7 à 12 ans, avec un effort initial plus important. Cet ajustement permettra de stabiliser la dette et d'atteindre la cible de surplus primaire. Il est essentiel que cet effort soit crédible, ce qui nécessite des changements dans le dispositif institutionnel de pilotage et de contrôle des finances publiques.
Enfin, la Note discute les sources potentielles de réduction du déficit public, du côté des dépenses comme du côté des recettes.
Sommaire
- Une brève histoire de la dette publique
Encadré 1 : Dynamique de la dette publique
- Perspective de moyen terme : atteindre un surplus primaire de 1 % du PIB
- De 2024 à 2030 : Comment faire? Arbitrer entre assainissement des finances publiques et croissance
Encadré 2 : De nouvelles règles budgétaires européennes
- Conclusion et recommandations
Encadré 3 : Épisode de consolidation budgétaire au Portugal
Encadré 4 : Quelques exemples de mesures ayant un impact positif sur les comptes publics
Encadré 5 : Les limites du pilotage budgétaire de l'Ondam
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Graphique 1 : Dette publique en % de PIB pour cinq pays européens, 1971-2023.
Graphique 2 : Décomposition économique de la variation de dette en % de PIB, 1970-2023.
Source : Note du Conseil d'analyse économique n° 82, juillet 2024.
Pour aller plus loin
Renne J-P. (2023), « Y'a-t-il une limite à l'endettement public ? », SES-ENS.