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Questions méthodologiques : les différentes sources statistiques pour estimer la délinquance et son évolution

Publié le 29/11/2011
En France, les premières enquêtes de victimation apparaissent bien plus tard qu'aux Etats-Unis, où elles sont présentes dès 1930. Aujourd'hui, on dispose de plusieurs sources statistiques pour mesurer le niveau de la délinquance et son évolution. Il est fondamental de comprendre la différence de nature de ces sources pour pouvoir interpréter et utiliser les statistiques ainsi produites, afin de saisir la réalité et les tendances de la délinquance. Les divergences de construction entre les statistiques administratives et les données issues des enquêtes posent des problèmes méthodologiques dès que l'on veut les comparer. L'observation de l'évolution de la délinquance se heurte aussi à l'hétérogénéité des enquêtes et à la discontinuité des données rendant difficile leur mise en série longue.

Les débats méthodologiques portant l'étude quantitative de la délinquance sont anciens, ils sont apparus dès la fin des années 1930 aux États-Unis avec les recherches sur la criminalité de l'école de Chicago. Alors que la statistique criminelle existe depuis le XIXème siècle grâce aux enregistrements des institutions judiciaires, d'autres sources de connaissance empirique de la délinquance vont se développer dans la deuxième moitié du XXème siècle à l'initiative des sociologues : les enquêtes de délinquance autoreportée (self-reported delinquency survey) qui naissent à la fin des années 1940 aux États-Unis, puis les enquêtes de victimation (victimization surveys) qui voient le jour dans les années 1950. Ces enquêtes ne cherchent pas seulement à chiffrer la délinquance, mais aussi à tester les théories sociologiques expliquant le comportement délinquant (par exemple la théorie de l'étiquetage) ou à mieux connaître les profils des auteurs et des victimes. Elles vont néanmoins devenir un instrument alternatif de mesure de la délinquance.

Dans les années 1960 est mise sur pied la première enquête nationale américaine de victimation, dans un contexte de controverse autour des indicateurs du crime et de la «face cachée du crime» (dark figure on crime), traduite en France par l'expression «chiffre noir» de la délinquance. La quantification de la victimation est alors clairement envisagée par les sociologues comme une alternative à la statistique administrative, offrant autre manière de percevoir et de décrire la réalité, «à la fois dans la perspective de créer les conditions d'un débat plus démocratique sur le crime (enlightenment) et pour accompagner les politiques publiques (policy knowledge)» (B. Benbouzid, 2010)[1]. Ces débats ont souligné le fait que les statistiques des registres administratifs étaient avant tout une mesure de l'activité répressive de la police, reflétant un point de vue institutionnel sur le crime, mais pas forcément des sources d'information très fiables sur la réalité de la délinquance pour servir d'appui à la définition des politiques publiques.

En France, les premières enquêtes de victimation vont apparaître bien plus tard. Aujourd'hui, on dispose de plusieurs sources statistiques pour mesurer le niveau de la délinquance et son évolution. Il est fondamental de comprendre la différence de nature de ces sources pour pouvoir interpréter et utiliser les statistiques ainsi produites, afin de saisir la réalité et les tendances de la délinquance. Les divergences de construction entre les statistiques administratives et les données issues des enquêtes posent des problèmes méthodologiques dès que l'on veut les comparer. L'observation de l'évolution de la délinquance se heurte aussi à l'hétérogénéité des enquêtes et à la discontinuité des données rendant difficile leur mise en série longue.

Des sources statistiques différentes pour quantifier la délinquance et son évolution en France

Les statistiques des administrations publiques

Les statistiques de délinquance constatée dénombrent les faits enregistrés par les services de police et les unités de gendarmerie et transmis à la justice, à l'exclusion des délits commis par imprudence, des infractions de circulation et de celles susceptibles des peines les moins graves (contraventions). Il s'agit donc d'un comptage de ce qui «sort» des services de police - les faits ayant fait l'objet de procès-verbaux - et non de ce qui y entre. En plus des «faits constatés», qui sont constituent les «chiffres de la délinquance» mis en avant dans les débats publics et les discours politiques, les services de police comptabilisent également les «faits élucidés» et les «personnes mises en cause» en précisant leur sexe, leur nationalité (française ou étrangère) et leur statut de mineur ou de majeur (L. Mucchielli, 2010)[2].

A côté des statistiques du Ministère de l'Intérieur, il existe également des statistiques judiciaires qui informent sur les poursuites en justice des affaires transmises aux parquets, ainsi que des statistiques des condamnations prononcées par les tribunaux permettant là aussi de connaître le sexe, l'âge, la nationalité des condamnés et le type de peine prononcée à leur encontre (prison, amende, etc.). Ces statistiques des parquets renseignent sur le traitement de la délinquance par la justice et sur les délits qui sont sanctionnés. Une partie importante des condamnations (presque 40%) concerne les délits routiers qui sont comptabilisés dans les statistiques judiciaires, alors qu'ils sont exclus de la statistique de police.

On dispose, pour ces données officielles de la délinquance, de séries statistiques longues : en France, elles démarrent en 1825 pour les statistiques judiciaires et en 1949 pour les statistiques policières (P. Robert et al., 2008). Jusqu'aux années 1990, avant l'apparition d'enquêtes nationales régulières sur la victimation en France, les administrations policières et judiciaires avaient le monopole des statistiques de la délinquance. L'une des particularités de ces données est le manque d'informations sur les conditions de collecte et de traitement des données policières et sur les pratiques d'enregistrement (R. Zauberman et al., 2009).

Les enquêtes de victimation

Depuis le milieu des années 1980, on dispose en France d'un certain nombre d'enquêtes nationales et régionales de victimation, mais elles forment un ensemble assez hétérogène dont les résultats ne sont pas toujours comparables.

- La première enquête nationale de victimation a été réalisée par le CESDIP en 1986 sur un échantillon de 11000 personnes. Elle a été précédée d'une vaste enquête qualitative en 1982. Cette première enquête a permis la mise au point de l'outil. Son objectif n'était pas un simple chiffrage des victimes. Les interviews menés auprès des victimes cherchaient à «analyser la diversité des manières de vivre une expérience de victimation en fonction des représentations et des positions sociales» de manière à obtenir une typologie des victimes (P. Robert, 2008).

- Après une interruption de 10 ans, l'Insee a inauguré les Enquêtes Permanentes sur les Conditions de Vie des Ménages (EPCVM). Ces enquêtes annuelles contenaient un module de victimation sur un petit nombre d'atteintes aux biens et aux personnes. Comme la première enquête du CESDIP, les questionnaires étaient administrés en face à face. Les 11 enquêtes conduites par l'Insee entre 1996 et 2006, auprès de 6000, puis de 13000 ménages pour les deux dernières enquêtes, ont permis d'observer l'évolution des victimations sur une décennie. Elles visaient davantage le chiffrage des incidents et la mesure du sentiment d'insécurité parmi la population, que l'observation des attitudes et comportements des victimes. Cependant, des changements ont été introduits dans les deux dernières enquêtes (2003-04 et 2004-05), à la fois dans l'échantillonnage, dans les questionnaires et les catégories de victimation, ce qui a rendu incertaine la continuité des observations (P. Robert et al., 2008).

- Depuis 2007, le dispositif EPCVM a été remplacé, à la demande de l'Observatoire national de la délinquance (OND), par les enquêtes annuelles Cadre de Vie et la Sécurité (CVS) entièrement consacrées aux victimations. Elles sont menées auprès de 25500 ménages (soit environ 17000 individus répondants de 14 ans ou plus). L'instrument et le protocole d'enquête ont été entièrement revus, une partie du questionnaire de l'enquête précédente a été modifiée. Selon R. Zauberman et al. (2010), «ce bouleversement a été introduit pour renforcer la comparabilité des données d'enquête avec les données policières plutôt qu'avec le souci de préserver leur comparabilité dans le temps, un choix qui a rendu complexe la mise en série des résultats».

- À côté des enquêtes nationales, le CESDIP a entrepris des enquêtes locales ou régionales de victimation. Les premières enquêtes locales datent de la fin des années 1980. Une importante enquête "Victimation et insécurité en île-de-France", commandée par Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région île-de-France (IAURIF), est réalisée tous les deux ans depuis 2001. C'est une enquête par téléphone. Elle a permis de dégager différents profils de victimes en fonction des circonstances de l'incident, des manières de la vivre, des façons d'y réagir (Zauberman et al., 2004). La stabilité de l'instrument d'enquête a autorisé une analyse longitudinale des séries entre 2001 et 2009[3]. Par ailleurs, le CESDIP a conduit cinq enquêtes urbaines sur la victimation et l'insécurité en 2005 à la demande du Forum Français pour la Sécurité Urbaine (FFSU) dans des communes adhérentes au Forum (Saint-Denis, Lyon, Gonesse, Aubervilliers, Aulnay-sous-Bois).

Du fait de leur jeunesse, on ne dispose pas de séries longues pour les enquêtes de victimation nationales en France[4]. De plus, leur hétérogénéité (instabilité du protocole d'enquête, échantillonnage, catégories utilisées, orientations du questionnaire et formulation des questions...) rend délicate leur mise en série. Par exemple, la question du «renvoi» n'est pas toujours traitée de la même manière dans les différentes enquêtes. Le renvoi peut consister en une simple information des services de police ou de gendarmerie par téléphone, une déclaration au commissariat qui n'est pas forcément enregistrée, une déclaration sous forme de main courante, ou un dépôt formel de plainte avec procès-verbal (seul cas pris en compte dans les statistiques policières). Selon la formulation des questions et le niveau de détail des questionnaires, le renvoi peut englober l'ensemble de ces cas ou être restreint à certains d'entre eux (Lisa Miceli et al., 2009). Plus généralement, tout changement même minime dans le protocole d'enquête introduit des artefacts rendant discontinues les séries.

Les chercheurs du CESDIP ont entrepris un important travail pour tenter de «raccorder» l'enquête du CESDIP des années 1980 aux EPCVM de l'Insee (P. Robert et al., 1999), puis les enquêtes des deux dernières campagnes d'EPCVM aux précédentes (H. Lagrange et al., 2004), et enfin plus récemment l'enquête CVS aux précédentes enquêtes nationales de victimation (Lisa Miceli et al., 2009). Grâce à ce travail de mise en série, il devient possible d'exploiter dans la durée les enquêtes nationales de victimation et de comparer les tendances des délinquances à moyen terme mises au jour par les enquêtes avec les séries statistiques policières.

Deux mesures et deux logiques différentes

Les statistiques policières et les enquêtes de victimation mesurent le même phénomène, la délinquance, mais avec deux logiques différentes, ce qui pose des difficultés techniques pour leur comparaison.

- Premièrement, les statistiques policières comptabilisent principalement des faits faisant l'objet d'une procédure judiciaire en valeur absolue, ces faits étant connus par l'administration à la suite d'une plainte ou d'une enquête policière. L'unité de comptage est donc le procès-verbal. C'est par exemple le nombre de vols enregistrés à partir des procès-verbaux dressés par la police.

Les enquêtes de victimation, quant à elles, comptabilisent des personnes (ou des ménages) à partir de l'observation d'un échantillon représentatif de la population, par exemple le nombre de personnes ayant déclaré avoir été victime d'un vol au cours d'une période donnée. Leurs résultats sont donc de nature probabiliste, ils sont donnés à l'intérieur d'intervalles de confiance[5].

- Deuxièmement, les statistiques officielles utilisent pour leurs comptages les catégories juridiques de l'Etat 4001. Il s'agit des 107 index de classement des crimes et délits utilisés dans les enregistrements des services de police et de gendarmerie, depuis les "règlements de compte entre malfaiteurs" jusqu'aux "délits économiques et financiers", en excluant les contraventions, les infractions au code de la route et les signalements en main courante. Cet Etat 4001 est un ensemble très hétéroclite, qui renvoie à des formes d'infractions extrêmement variées, du point de vue de leur gravité, de leur importance numérique, des auteurs ou des victimes concernés, des circonstances ou des types d'atteinte[6].

Les données des enquêtes de victimation sont issues de questionnaires élaborés par des chercheurs. Les questions posées aux enquêtés (avez-vous été volé, agressé... ?) doivent être comprises de la même manière par tous les enquêtés. Elles se fondent davantage sur le vécu et le ressenti des personnes, d'où une certaine subjectivité des réponses.

Ainsi, les statistiques officielles utilisent des catégories objectives, mais, en comptabilisant les seuls faits portés à la connaissance des autorités et verbalisés, elles fournissent plus une mesure de l'activité des services de police et de gendarmerie qu'une quantification de la criminalité réelle. Pour Robert et al. (2008), on ne dispose là que d'une mesure indirecte de la délinquance et de l'évolution. En effet, ces statistiques peuvent être affectées par des changements dans le fonctionnement des institutions pénales (par exemple une modification dans les périmètres de certaines catégories de délits) et dans l'attitude des autorités ou des victimes (par exemple une plus forte propension à l'enregistrement ou à porter plainte).

Les enquêtes de victimation permettent d'avoir connaissance des faits qui ne sont pas rapportés à la police ni découverts par elle, et qui n'apparaissent donc pas dans les statistiques officielles, comme les violences sans gravité, les vols simples et les agressions intrafamiliales. Si elles peuvent parfois surestimer certaines formes de délinquance comme les violences non physiques (violences verbales...), elles sous-estiment les infractions qui ne comportent pas de victime identifiable, telles que la corruption, la fraude fiscale, le trafic de stupéfiants, et qui peuvent être découvertes par l'activité policière. De plus, les réponses des enquêtés peuvent être sensibles à la manière de formuler les questions ou aux conditions de collecte, mais aussi, en ce qui concerne les agressions, à l'évolution des représentations de la violence dans la société. Mais, comme nous l'avons déjà souligné, les enquêtes de victimation ne sont pas uniquement un instrument de mesure des victimations puisqu'elles permettent aussi d'observer les profils et les comportements des victimes, les perceptions de la violence, et leurs évolutions au cours du temps.

Quelle méthode pour rendre les sources comparables ?

Compte-tenu des différences de mesure entre les statistiques policières et les données des enquêtes, ces deux sources statistiques ne peuvent être comparées aisément. Les chercheurs du CESDIP (Renée Zauberman, Philippe Robert...) ont proposé une méthode statistique permettant de rendre ces données comparables.

Pour rendre ces deux sources comparables, statistiques de police et données d'enquêtes de victimation, il faut transformer les données d'enquête de manière à ce que les unités de compte soient de même nature que celles des données policières. Voici un résumé de la méthode que les chercheurs du CESDIP ont mise au point (P. Robert et al., 1999) pour pouvoir confronter statistiques administratives et données d'enquête :

« Les enquêtes renseignent sur la proportion d'enquêtés victimes (prévalence) et sur le nombre de victimations de la même sorte (multivictimation) au cours des deux dernières années. En multipliant l'une par l'autre, on obtient un taux d'incidence (nombre de faits pour 100 répondants, subis au cours de la période de référence). Si l'on rapporte ce dernier taux à la population (de 15 ans et plus) - ou au nombre de ménages s'il s'agit de cambriolages par exemple -, on parvient à des estimés en nombres absolus que l'on peut enfin comparer aux données policières. [...]

Dans la mesure où les enquêtes de victimation ont été créées parce que toute une série de faits n'étaient pas rapportés à la police ni découverts par elle, les enregistrements policiers se trouvent en principe en dessous des estimés d'enquête.

Pour rendre compte de cet écart, on introduit la notion d'incidence apparente qui ne retient que les victimations pour lesquelles les enquêtés déclarent avoir déposé plainte. Là encore, on rapporte le taux obtenu à la population de référence pour obtenir des estimés en valeur absolue comparables aux données policières. Celles-ci doivent en principe se rapprocher des estimés d'incidence apparente, ou du moins s'inscrire dans les intervalles de confiance des estimés d'incidence apparente. Si c'est le cas, la différence entre les deux sources s'explique entièrement par la plus ou moins grande propension des victimes à informer la police. Si, au contraire, les données policières se situent au-dessus ou en dessous des limites de l'intervalle de confiance, il faudra aller chercher ailleurs les raisons de la différence entre les deux sources. »

Source : "Mesurer les vols personnels en France : enquêtes de victimation et statistiques de police depuis le milieu des années 1980", L. Miceli, P. Robert, R. Zauberman, S. Névanen (Questions Pénales XXIII.3, juin 2010) et "Mesurer les cambriolages en France : enquêtes de victimation et statistiques de police depuis le milieu des années 1980", R. Zauberman, P. Robert, S. Névanen, D. Bon (Questions Pénales, XXIV.1, mars 2011).

Au final, si l'apport des enquêtes de victimation à une meilleure connaissance empirique de la délinquance est donc indéniable, l'utilisation de cet outil pour observer l'évolution de la délinquance à moyen terme passe par une réflexion méthodologique et un important travail de mise en série et de transformation des données. C'est à ce prix que les données d'enquête sont susceptibles de compléter et de nuancer les statistiques institutionnelles dont les insuffisances sont largement reconnus, et au-delà, de devenir elles aussi un instrument d'évaluation des politiques publiques de sécurité.


Bibliographie

On pourra consulter les articles qui suivent pour une présentation plus détaillée de ces questions méthodologiques.

- B. Benbouzid [2010], "L'enquête de victimation américaine : de l'étude compréhensive à l'analyse des facteurs de risque (1965-1985)", Revue Française de Socio-Économie 1/2010 (n°5), p.63-82.

- L. Mucchielli [2010], "Les techniques et les enjeux de la mesure de la délinquance", Revue Savoir/Agir, n°14, décembre 2010. Une partie est consacrée à la construction des données de la délinquance et une autre aux usages de ces statistiques.

- P. Robert, R. Zauberman, S. Névanen, E. Didier [2008], "L'évolution de la délinquance d'après les enquêtes de victimation, France 1984-2005", Déviance et Société, vol.32, n°4, 435-471.

- P. Robert [2008], "Enquêtes françaises sur la victimation et l'insécurité" (European Forum for Urban Security). Un état des enquêtes sur la victimation et l'insécurité en France et des utilisations qui en sont faites.

- R. Zauberman, P. Robert, S. Névanen, E. Didier [2009], "L'acteur et la mesure. Le comptage de la délinquance entre données administratives et enquête", Revue française de sociologie, vol.50, n°1, p.31-62.

- L. Miceli, S. Névanen, P. Robert et R. Zauberman [2009], "De l'instantané au long métrage. L'enquête Cadre de Vie et Sécurité dans la série des données sur la victimation", Economie et Statistique, n°426.

- H. Lagrange, P. Robert, R. Zauberman, M.-L. Pottier [2004], "Enquêtes de victimation et statistiques de police : les difficultés d'une comparaison", Déviance et société, "Un autre regard sur la société", vol.28, n°3. Un premier essai de mise en série des données des enquêtes de victimation par les chercheurs du CESDIP englobant l'enquête CESDIP de 1986 et les sept premières EPCVM de l'INSEE.

- P. Robert, R. Zauberman, M.-L.s Pottier, H. Lagrange [1999], "Mesurer le crime. Entre statistiques de police et enquêtes de victimation (1985-1995)", Revue française de sociologie, vol.40, n°2, p.255-294. L'article précise les conditions de comparaison entre l'enquête CESDIP de 1986 et la première enquête EPCVM de l'INSEE (module victimation) dix ans après, il propose une première confrontation sur la longue période des données d'enquêtes avec les données administratives.

Notes

[1] Les principaux défenseurs des enquêtes de victimation aux États-Unis dans les années 1960 sont Albert Biderman et Albert Reiss, formés à l'école de Chicago, qui ont publié en 1967 un article marquant : "On exploring the 'dark figure' of crime", Annals of the American Academy of Political and Social Science, 374, p.1-15.

[2] Laurent Mucchielli indique que les «personnes mises en causes», c'est-à-dire suspectées par la police, ne sont «pas nécessairement représentatives de la délinquance», car il s'agit des personnes suspectées pour les seuls «faits élucidés», soit seulement une petite fraction des faits constatés (un tiers en moyenne). De plus, poursuit-il, les taux d'élucidation sont très variables selon la nature des infractions : de 94,1% pour les 542 «homicides pour autres motifs» en 2009 à 3,4% pour les 133822 «vols à la roulotte». Ce tableau du Ministère de l'Intérieur présente les faits constatés, les faits élucidés et les personnes mises en causes pour les 107 catégories d'infractions répertoriées dans les statistiques policières en janvier 2009. Remarque : les faits élucidés dénombrés ne correspondent pas forcément aux faits constatés durant le mois (ou l'année), il peut donc arriver que le nombre de faits élucidés soit supérieur aux nombre de faits constatés durant la période.

[3] Voir le rapport de recherche en ligne du CESDIP : "Victimation et insécurité en Île-de-France 2006-2007-2008", Analyse de la 5e enquête (2009) de l'IAU-IdF, David Bon, Matthieu de Castelbajac, Sophie Névanen, Philippe Robert, Renée Zauberman, Etudes et Données Pénales n°110, 2011.

[4] Aux Etats-Unis, où sont apparues les premières enquêtes de victimation, on dispose de séries longues de victimation depuis 1973, au Royaume-Uni depuis les années 1980, dans d'autres pays européens comme les Pays-Bas également...

[5] Ces intervalles de confiance sont d'autant plus ouverts que la taille des échantillons est faible. Selon Robert et al. (2008), «la principale faiblesse des enquêtes nationales françaises» est «la très faible taille de leurs échantillons». Cela n'a été que partiellement corrigé après le doublement des échantillons nationaux de ménages dans la campagne 2003-2004 de l'enquête EPCVM de l'Insee (de 6000 à plus de 13000 ménages). Le risque est donc que les résultats soient peu significatifs pour les victimations les plus rares comme c'est le cas des violences physiques caractérisées (les agressions physiques ayant donné lieu à une ITT de plus de huit jours).

[6] L'ONDRP propose un classement des index de l'état 4001. Il a créé quatre indicateurs par regroupement d'index de la nomenclature policière : les atteintes volontaires à l'intégrité physique ; les atteintes aux biens ; les infractions révélées par l'action des services ; les escroqueries et infractions économiques et financières.

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