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L'ethnicisation d'un conflit. Rwanda un conflit ethnique sans ethnie

Publié le 31/03/2008

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Quelques éléments d'analyse à partir d'articles extraits des sources suivantes :

Rapport de la mission d'information sur le Rwanda. Assemblée Nationale. Décembre 1998.
Mélina Hadjidakis, Comprendre le génocide rwandais, 18 septembre 2005, http://www.antidotes-web.net
Dominique Franche, Rwanda, Généalogie d'un génocide, 1997
Colette Braeckman, Rwanda, histoire d'un génocide, 1994

Avant la colonisation, le Rwanda avait une population homogène (même langue, culture, religion). Il n'existait pas de groupes ethniques et si les rwandais se reconnaissaient Hutu ou Tutsi, cette appellation n'était pas fondamentale dans l'identité sociale du rwandais et était mouvante (un Hutu pouvait devenir Tutsi...).

La colonisation allemande (fin XIXe) puis belge (mandat de la Société des Nations en 1919) induit le passage d'une identité sociale à une identité ethnique en transposant un schéma de pensée étranger qui va être à la base du dualisme identitaire Hutu / Tutsi. (mythe d'une ancienne migration de Blancs en Afrique Noire : les Tutsi ayant majoritairement la peau claire, ce devaient être des « nègres blancs » appartenant à une race supérieure).

Dans les années 30, cette distinction raciale propagée par les colonisateurs, s'ancre profondément dans la société rwandaise. Les Tutsi issus de la royauté traditionnelle deviennent peu à peu les relais du système colonial et dans la mémoire collective des paysans Hutus les Tutsis sont plus responsables d'exactions que les colons, finalement moins visibles dans leur quotidien que les nobles Tutsis. L'Eglise catholique s'occupe de la formation des élites Tutsi.

Lorsque les Tutsis réclament l'indépendance du Rwanda, l'Eglise leur retire son soutien et le donne aux Hutus, sur la base de la majorité démographique (90% de la population). Ce soutien participe à la montée du pouvoir Hutu. La situation s'envenime dès 1959, suite à des luttes entre les Hutus et les Tutsis. Des milliers de Tutsis s'exilent au Zaire (Rép.Démo du Congo), en Ouganda...,et ceux qui restent dans le pays vivent dans des conditions de citoyens de seconde zone (pas d'accès à la fonction publique, à l'armée, à l'instruction...).

En 1961, le parti du mouvement de l'émancipation hutu accède au pouvoir, ce qui marque le début du pouvoir hutu. Ce gouvernement cherche à se débarrasser de la minorité Tutsi. En 1962, le pays accède à l'indépendance et les élites Tutsi sont chassées du pouvoir. C'est le début du génocide qui entraîne le début du génocide et un exode massif des Tutsis vers l'Ouganda.

On assiste dans ce contexte à une inversion du racisme des nobles Tutsi contre les Hutu mais ce racisme s'étend à l'ensemble des Tutsis et notamment les Tutsis du Nord qui avaient autant souffert de la domination des nobles Tutsis. L'idée que les Hutus et les Tutsis sont deux races en guerre est diffusée par les dirigeants rwandais et cela leur permis d'unir la nation autour d'un chef d'Etat contre un ennemi commun sur le thème « massacrer avant d'être massacré ».

L'ethnicisation de la société rwandaise est donc le fruit d'une construction politique et institutionnelle élaborée par la puissance coloniale et intériorisée par les rwandais.