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A) Les principaux objectifs de l'investissement dans l'aide et l'éducation à la petite enfance.

Publié le 23/04/2009
L'entrée massive des femmes sur le marché du travail depuis les années 70 a permis d'accroitre le taux d'activité et par suite de maintenir le niveau de la croissance dans des pays industrialisés qui sont de plus en tournés vers une économie du savoir et de services. La participation des femmes à l'activité économique est d'autant plus nécessaire que leur niveau d'éducation est relativement supérieur et leur niveau de rémunération inférieur aux hommes.

2) Aider les femmes à mieux concilier travail et vie de famille.

Les enjeux d'un taux d'activité féminin élevé :

Une étude du Department for Education and Skills [6] sur le travail des femmes britanniques évalue leur contribution à 30% de la richesse nationale du Royaume-Uni (la contribution des femmes atteindrait même 40% de la richesse nationale au Danemark et en Suède). Dans plusieurs pays de l'OCDE, plus de 75% des femmes âgées de 25 à 54 ans font désormais partie de la population active.

Ce taux d'activité des femmes ne va évidemment pas sans se répercuter sur les modes d'éducation des enfants. L'entrée des femmes sur le marché du travail se traduit ainsi par une augmentation de la demande de services d'accueil. Une enquête menée par la European Foundation [7] souligne ainsi que la majorité des femmes avec de jeunes enfants en Europe souhaitent pouvoir associer une solution de garde de qualité à un travail à temps plein. Pourtant, le travail à temps partiel touche tout particulièrement les femmes dans plusieurs pays de L'OCDE (Graphique 2), ce qui pose des problème d'égalité entre les sexes et peut se traduire, lorsqu'il se prolonge durant les premières années d'éducation des enfants, par un ralentissement de la carrière professionnelle, une réduction du montant des retraites, autant d'éléments qui vont se faire ressentir tout au long de la période de vie active.[8]

Graphique 2 : Proportion de travail à temps partiel. Hommes et femmes. 2004.

Petite enfance. Grand défi II. OCDE. 2007

Voir aussi les données de 2007 pour l'Union Européenne.
 

Les enjeux d'une plus grande égalité entre les sexes :

Il va sans dire qu'il est souvent complexe de concilier la maternité avec une carrière professionnelle. Selon Gosta Esping-Andersen [9], « la compatibilité de la maternité et d'une carrière professionnelle dépend de la nature du soutien institutionnel en place », en particulier des aides publiques au congé parental et à l'organisation des services d'accueil de la petite enfance et de l'existence d'emplois compatibles avec une vie de famille.
Mais le partage équitable des tâches domestiques et d'éducation des enfants constitue un autre facteur d'équité entre les sexes, qui se répercute sur l'égalité des sexes au travail. Un emploi du temps domestique chargé peut en effet contraindre fortement la carrière des femmes en les incitant à préférer un temps partiel ou à limiter leurs ambitions professionnelles faute de temps pour se donner les moyens de réussir dans leur parcours professionnel ou faute de trouver un emploi à temps partiel conforme à leur niveau de qualification.
La loi permet en principe aux femmes d'exiger une égalité de traitement lors du recrutement : une égalité de rémunération à travail égal et une égalité dans l'évolution professionnelle fondée sur le mérite (même si l'on connaît désormais bien le phénomène de « plafond de verre » qui explique la faible présence des femmes dans des postes à responsabilité). Il est possible pour les femmes de contester légalement une situation jugée injuste. Dans le cas de la répartition des tâches domestiques entre homme et femme au sein du foyer, il est plus difficile pour les femmes de modifier un partage inégal pour des raisons essentiellement culturelles. On observe ainsi qu'en moyenne dans les pays de l'Union Européenne, les femmes s'acquittent de 80% des tâches domestiques et d'éducation des enfants. En France, par exemple, les femmes continuent de porter la responsabilité principale des tâches familiales et domestiques au foyer [10] et ce déséquilibre est renforcé par le taux d'emploi plus faible des femmes avec de jeunes enfants. Le tableau 1 met en évidence les écarts d'implication des parents dans l'éducation et le soin accordé aux enfants puisque les femmes consacrent toujours plus deux heures de plus que les hommes aux tâches domestiques.

Tableau 1 : Evolution des temps sociaux au cours d'une journée moyenne
En heures et minutes

 

  Femmes Hommes Total
  1986 1999 1986 1999 1986 1999
Temps physiologique 11 h 40 11 h 48 11 h 28 11 h 32 11 h 34 11 h 40
Travail, études, formation 3 h 16 3 h 27 5 h 47 5 h 30 4 h 30 4 h 28
Temps domestique 5 h 07 4 h 36 2 h 07 2 h 13 3 h 39 3 h 25
dont : Ménage, courses 4 h 10 3 h 40 1 h 10 1 h 15 2 h 42 2 h 28
Soins aux enfants 0 h 42 0 h 38 0 h 10 0 h 11 0 h 26 0 h 25
Jardinage, bricolage 0 h 15 0 h 18 0 h 47 0 h 47 0 h 31 0 h 32
Temps libre 3 h 13 3 h 31 3 h 53 4 h 09 3 h 32 3 h 50
Trajet 0 h 44 0 h 38 0 h 45 0 h 36 0 h 45 0 h 37
Ensemble 24 h 00 24 h 00 24 h 00 24 h 00 24 h 00 24 h 00


Champ : France métropolitaine, individus âgés de 15 ans à 60 ans, hors étudiants et retraités.
Source : Insee, Enquêtes emploi du temps 1986 et 1999


Ces observations confirment l'importance d'investir dans les structures d'accueil pour la petite enfance car les enjeux sont nombreux, en termes bien sûr d'égalité des chances et d'accès à l'emploi entre hommes et femmes, mais aussi pour favoriser un taux d'activité des femmes plus élevé, aujourd'hui indispensable à la croissance des pays développés et en développement.
 

Les enjeux d'une fécondité élevée :

Un autre objectif de l'investissement dans le capital humain dès la naissance est de contribuer à soutenir la fécondité des femmes et de limiter en cela le vieillissement démographique.
A l'exception du Mexique et des Etats-Unis, la majorité des pays de l'OCDE ont des taux de fécondité inférieurs au seuil de remplacement des générations. Cette situation met en question la capacité des pays à assurer le renouvellement de leur main d'œuvre et à maintenir le dynamisme de leur économie afin de garantir un niveau de retraite et de santé publique équivalent à celui d'aujourd'hui pour leur population vieillissante.
Si le niveau de fécondité est affecté par des facteurs aussi divers que l'allongement des études, la précarité des emplois ou le niveau de chômage qui dans certains pays viennent retarder le moment où un couple décide de former une famille, le coût estimé de l'éducation des enfants peut aussi avoir un effet dissuasif sur la décision d'en avoir. A cet égard, on peut supposer que la fourniture de service d'accueil et d'aide à la petite enfance peut avoir un impact positif sur le taux de fécondité. Pour autant, l'économiste américain et prix Nobel Gary Becker estime que la mise en place par les pouvoirs publics de services d'aide à la petite enfance et de politiques de congé parental pourrait influencer les décisions familiales, mais seulement « de façon indirecte et inefficace » [11]. Ainsi, le taux de fécondité dans la plupart des pays européens qui mettent en place ce type de services reste encore largement inférieur au taux de remplacement des générations.
Dans ce contexte, selon G.Becker, la meilleure façon d'encourager les naissances est d'accorder une allocation mensuelle aux familles qui ont un enfant supplémentaire : « un programme d'allocations familiales efficace devrait concentrer les aides sur la décision de procréation marginale, c'est-à-dire sur la deuxième, troisième ou énième naissance qui pourrait ne jamais avoir lieu sans aides financières » [12]. Pourtant, note le rapport de l'OCDE [13] , « malgré une prime considérable au troisième enfant, le taux de fécondité du Québec ne se distingue par significativement de celui du reste du Canada. L'Autriche aussi accorde des aides familiales plus généreuses que la plupart des pays de l'OCDE, mais continue de connaître un faible taux de fécondité totale. ». Se pose ainsi la question des politiques adéquates pour stimuler la natalité. Nous verrons de ce point de vue, que les pratiques des pays sont extrêmement variées et riches d'enseignements. Certaines vont plus dans le sens d'une accumulation du capital humain que d'autres.

Naviguer dans le dossier :

L'ACCUMULATION DU CAPITAL HUMAIN PAR DES POLITIQUES A DESTINATION DE LA PETITE ENFANCE.
A) Les principaux objectifs de l'investissement dans l'aide et l'éducation à la petite enfance :

1) Favoriser l'accumulation du capital humain.
2) Aider les femmes à mieux concilier travail et vie de famille (vous êtes ici).
3) Lutter contre la pauvreté infantile et intégrer les familles immigrées par leurs enfants.

B) Les moyens de favoriser l'accumulation de capital humain dès la petite enfance.
1) Des services universels ou des services ciblés sur les enfants ayant des besoins spéciaux. Le cas des 3-6 ans.
2) Les politiques publiques en faveur de la conciliation travail / vie familiale : les politiques à destination de la petite enfance.
3) La coordination des services de la petite enfance avec le système éducatif.


Retour au dossier « capital humain » (partie 2)

 


Notes :

[6] DfES (2004), Choice for Parents: The Best Start for Children. A 10-year Strategy for Children, HMSO, Norwich.

[7] European Foundation (2003), Promoting Gender Equality in the Workplace - Key Findings from 21 Company Structures, European Foundation, Dublin.

[8] Glass, J.L. et S.B. Estes (1997), « The Family Responsive Workplace », Annual Review of Sociology, vol. 23, pp. 289-313.

[9] Esping-Andersen, G., D. Gallie, A. Hemerick et J. Myles (2002), Why We Need a New Welfare State,Oxford University Press, Oxford.

[10] Méda, D. (2001), Le temps des femmes : pour un nouveau partage des rôles, Champs/Flammarion, Paris.

[11] Becker, G. (2005), Lloyd Delamar lectures, American University of Paris, Paris.

[12] Becker, G. et R. Posner (2005), « Should Governments Subsidise Child Care and Work Leaves? », Becker-Posner Blog, novembre 2005,

[13] OCDE. Petite enfance, grands défis II. Education et structures d'accueil. OCDE 2007. p.36.