L'élargissement de l'UE : Présentation générale
Mathilde Maurel
Boris Najman
A- Spécificités du nouvel élargissement
Le prochain élargissement de l'Union européenne à dix nouveaux membres dont huit PECO est l'aboutissement d'un processus engagé au Conseil européen de Copenhague en 1993 qui a défini les critères d'adhésion [1] . Le délai entre les négociations d'adhésion, qui n'ont réellement débuté qu'à partir de mars 1998, d'abord avec six pays (Pologne, Hongrie, République Tchèque, Slovénie, Estonie et Chypre que l'on a dénommé le groupe de Luxembourg), puis avec six autres en février 2000 (Slovaquie, Lettonie, Lituanie, Malte, Roumanie et Bulgarie constituant le groupe dit de Helsinki), et leurs conclusions en décembre 2002 aura été exceptionnellement court. L'entrée définitive de dix candidats sur douze [2] dans l'Union a pris place officiellement le 1-er mai 2004. L'élargissement à l'Est est souvent présenté comme une transformation majeure par rapport aux précédentes opérations du même type. Du point de vue de l'augmentation de la population et de la superficie qui en résultent, le tableau suivant montre que ce cinquième élargissement (E5) a une ampleur comparable à ceux de 1973 (E1) et de 1986 (E3) qui ont adjoint respectivement le Danemark, l'Irlande et le Royaume Uni, puis l'Espagne et le Portugal à l'UE de l'époque.
Comparaison des premier, troisième et cinquième élargissements
Source : PIB d'après les données OCDE (Economic Outlook), population et superficies d'après les données de la Banque Mondiale
Ces similarités ne doivent pas cacher deux différences majeures, qui donnent à la présente opération un caractère très particulier.
1) Tout d'abord, les pays candidats sont plus différents des pays membres que lors des précédents élargissements. Ces différences sont de trois ordres : les nouveaux membres sont relativement pauvres par rapport à la moyenne de l'UE, ce qui apparaît dans le niveau du PIB par tête des pays adhérents du tableau précédent ; le chômage, de même que la part de l'agriculture dans l'emploi total [3] , sont relativement élevés, le ratio crédit / PIB est faible, en bref plusieurs indicateurs reflètent une importante divergence structurelle avec les états-membres ; enfin, les indicateurs de bonne gouvernance dans le domaine politique ou administratif sont faibles, c'est à dire que symétriquement la corruption reste à un niveau relativement élevé. Bien que sur ces trois fronts, des progrès spectaculaires aient déjà été accomplis dans la plupart des pays concernés, ces caractéristiques (qui sont d'ailleurs probablement liées entre elles) reflètent la nécessité à la fois d'un rattrapage et surtout d'une restructuration longue qui vont devoir se poursuivre encore pendant plusieurs années ou dizaines d'années.
En contrepartie de cette différence de développement, la croissance des pays adhérents a été depuis 1994 et reste actuellement très largement supérieure à celle de l'Union européenne.
2) La seconde différence majeure entre le présent élargissement et les précédents vient des états-membres eux-mêmes : le degré d'intégration de leurs économies est en effet beaucoup plus élevé en 2004 qu'il ne l'était en 1986 ou a fortiori en 1973. Et en particulier, la qualité de membre de l'UE implique maintenant la mise en œuvre de "l'Acquis communautaire", ensemble de trente et un chapitres institutionnels représentant l'ensemble des réglementations communes aux états-membres.
N'y a-t-il pas alors contradiction entre l'impératif de restructuration et de rattrapage d'une part et la nécessité de s'aligner sur des réglementations exigeantes conçues pour des sociétés très éloignées ? La question se pose d'autant plus que dans certains domaines tels que la fiscalité les PECO adhérents ont des institutions plus "libérales" - au sens où elles représentent moins de distorsion par rapport au marché - que la plupart des états-membres [4] . D'autres points ont par contre pu être difficiles à réaliser pour des pays émergents, tels que la libre circulation des capitaux. Pour ce qui concerne la flexibilité des marchés du travail, Nicoletti, Scarpetta et Boylaud (1999) montrent que les marchés du travail sont moins réglementés que les pays de l'UE ou de l'eurozone. Ils sont en revanche plus réglementés que le groupe des pays "anglosaxons" (Etats-Unis, Royaume Uni, Australie, Canada, Nouvelle Zélande, Irlande) [5] . Mais le point sur lequel se focalisent les débats semble être l'adhésion à l'Union économique et monétaire. C'est sur ce point des relations entre intégration économique et intégration monétaire que portent les contributions rassemblées dans le présent numéro [6].
B- Modalités et étapes de l'adhésion à l'Union européenne
Avant de présenter les différentes facettes de ce débat et la façon dont elles sont reflétées dans les pages qui suivent, il n'est pas inutile de rappeler les termes officiels de l'adhésion à l'union économique et monétaire et la position adoptée par les divers pays candidats en la matière.
Adhésion à l'Union Economique et Monétaire : la feuille de route initiale
Le chapitre 11 de l'Acquis communautaire concerne l'adhésion à l'Union Economique et Monétaire. La présence de ce chapitre pourrait être interprétée (à tort) comme une obligation pour les pays candidats sinon d'adopter immédiatement l'euro, du moins de s'y préparer. Il est d'ailleurs assez surprenant de constater que dès décembre 2002, la totalité des pays candidats (y compris la Roumanie et la Bulgarie) avaient été gratifiés d'une évaluation positive à propos de ce chapitre. De fait, il ne semble pas facile de concilier les impératifs de la convergence réelle avec les conditions d'appartenance à la zone euro : il y a en effet une assez forte probabilité que la croissance rapide d'un ou l'autre PECO (ainsi que l'importance des restructurations à accomplir) engendre par exemple une inflation au-delà de la limite approximative de 3% qui résulte de la règle de l'UEM. Le pays en question aurait alors à choisir entre une convergence réelle rapide avec les partenaires de l'UE, mais sans respecter les clauses de l'UEM, et réaliser la convergence nominale par une politique budgétaire rigoureuse au risque de retarder la convergence réelle. Dans les deux cas, l'adoption de l'euro par un tel pays semblerait compromise.
Cependant, un examen plus précis du régime [7] fixé par le chapitre 11 pour l'entrée des pays adhérents dans l'UEM montre que leur passage à l'euro n'est pas obligatoire. Paradoxalement, puisqu'il est répété ad libitum que "les pays adhérents ne bénéficient pas d'une clause d'exemption (opt out) concernant l'adoption de la monnaie unique (cas du Royaume Uni et du Danemark)", ni l'adoption de l'euro, ni même l'adoption du mécanisme de change du système monétaire européen ne sont obligatoires. L'Acquis communautaire en matière d'UEM laisse en fait une quasi-totale liberté de choix. C'est ce qui explique que le chapitre 11 ait été considéré très tôt comme adopté par tous les pays candidats y compris par un pays fortement inflationniste tel que la Roumanie. De façon presque explicite, la non-adoption de l'euro apparaît comme la règle et l'adoption de l'euro est l'exception. Pour les pays adhérents qui adopteront une stratégie d'intégration à l'UEM, le cheminement comportera trois étapes à partir de l'adhésion effective à l'UE (1-er mai 2004).
Première étape : le statu quo ante
En principe, aucune modification du régime de change, ni même aucun engagement de modification, n'est demandé aux pays adhérents du jour de leur adhésion officielle à l'UE. Il n'y a donc apparemment pas de différence entre la phase de pré-adhésion et celle de post-adhésion : le régime de change des pays adhérents doit simplement garantir "une compétitivité et une stabilité macro-économique durables". Mais plus généralement, le principe de base qui est appliqué ici est que la politique de change d'un pays qui devient membre de l'UE devient ipso facto une question d'intérêt commun pour tous les états-membres de l'Union. Toute modification ultérieure de ce régime sera donc soumise à l'agrément de la communauté. Cette première étape peut durer indéfiniment. Cependant, elle peut être aussi réduite à zéro et dans ce cas un pays pourrait aborder directement la deuxième étape.
Deuxième étape : la participation au mécanisme de change du SME2
La décision de participation (qui est facultative) relève de chaque pays adhérent mais elle est soumise à un accord des autorités monétaires européennes (accord à négocier entre les autorités du pays adhérent - ministère des finances et banque centrale -, la BCE, les ministres des finances des états-membres et la Commission européenne) sur la fixation du taux pivot et de la marge de fluctuation. Rappelons que dans la troisième phase de l'UEM commencée au 1-er janvier 1999, les marges standard de fluctuation autour des taux pivot sont restées à 15% (de chaque côté), c'est à dire de même amplitude qu'en 1993. Pour les pays candidats ayant un établi un currency board crédible ou un système de changes fixes à bandes étroites basé sur l'euro, un tel régime monétaire pourrait être validé comme mécanisme de change du SME, soit directement, soit avec des bandes beaucoup plus étroites que les marges standard [8]. Pour les autres pays (ou pour les pays dont le currency board apparaîtrait peu crédible), la négociation sur le taux pivot doit mettre en évidence sa soutenabilité à long terme, et - dans le cadre d'un régime "ajustable" - il n'est pas exclu que ce taux soit modifié une fois le pays adhérent rentré dans l'UEM (comme cela fut le cas pour la Grèce) [9]. Cette deuxième étape a une durée minimale de deux ans quand il s'agit de passer à la troisième étape.
Troisième étape : l'adoption de l'euro
(également facultative). Les pays candidats doivent pour cela "réaliser un degré élevé de convergence économique durable" ; ce degré est évalué au moyen des critères de Maastricht [10], qui doivent être observés au cours de la deuxième étape : inflation s'écartant de 1,5% au plus des trois meilleures performances parmi les états-membres ; déficit public inférieur à 3% du PIB [11] ; dette publique inférieure à 60% du PIB ; taux d'intérêt à long terme ne s'écartant pas de plus de 2% des trois meilleures performances de l'Eurozone ; respect des marges de fluctuation (sans dévaluation ni réévaluation) du mécanisme de change pendant une durée de deux ans au moins. Notons que sur ce dernier point, il ne s'agit pas seulement de participer au mécanisme pendant deux ans, mais de le faire en maintenant sa parité fixe.
Théoriquement, un pays adhérent qui souhaiterait adopter l'euro le plus rapidement possible pourrait sauter dès le 1-er mai 2004 directement à la deuxième étape (sous réserve de trouver un accord sur le cours pivot et les marges) et passer à l'euro au bout de deux ans (sous réserve que tous les critères de Maastricht soient respectés), soit le 1-er mai 2006. Pour le moment, seule l'Estonie affiche son intention de suivre un tel calendrier serré ; d'autres pays (par exemple la Slovénie) manifestent leur intention d'adopter l'euro rapidement mais en laissant un peu plus de marge. Un pays adhérent qui ne souhaite pas adopter l'euro peut conserver sa monnaie et son régime de change initial sans limite : ce pourrait être l'option suggérée implicitement à la Pologne. Il peut cependant décider à tout moment de participer au mécanisme de change du SME2 (toujours sous réserve de l'accord de la BCE) et rester dans cette situation sans limite [12] ; qui plus est, il peut le faire en maintenant son taux de change fixe ou en l'ajustant périodiquement.
C- La position des autorités de l'Union européenne sur la question
Enfin, les autorités de l'Union européenne manifestent clairement leur opposition à toute euroïsation unilatérale [13] : l'utilisation de l'euro "concurremment à la monnaie nationale" avant l'intégration dans l'Eurosystème est fortement déconseillée. En effet, du point de vue de ces autorités, l'euroïsation "va à l'encontre" du concept de l'UEM qui est que l'adoption de l'euro est le résultat d'un processus de convergence à l'intérieur d'un cadre multilatéral. Les termes "concurremment à la monnaie nationale" méritent d'être explicités : il est difficile d'éviter un phénomène de substitution monétaire classique par lequel à la fois des euro-billets circulent dans les PECO et des dépôts en devises en euro sont détenus par des résidents de ces PECO ; cette euroïsation spontanée - même si elle n'est guère appréciée par la BCE - semble inévitable, et on ne voit pas a priori pourquoi ce qui s'applique au dollar depuis des dizaines d'années épargnerait la devise européenne [14]. L'interdiction d'euroïsation vise donc en fait l'utilisation officielle de l'euro à la place de la monnaie nationale et en qualité de monnaie nationale. Il y a donc ici un signal clair que l'adoption de l'euro par un pays ne peut se faire que si la BCE le souhaite, et le moins que l'on puisse dire est que la BCE ne manifeste pas son enthousiasme envers l'adoption de l'euro par les pays candidats [15].
Cette attitude vis à vis de l'euroïsation unilatérale doit être complétée par les positions officielles vis à vis des currency board. On a mentionné ci-dessus que les currency board (basés sur l'euro) pourraient être autorisés à se transformer en variante du mécanisme de change du SME2, une mesure qui outre l'Estonie pourrait concerner les deux autres pays baltes, et ultérieurement la Bulgarie et plusieurs pays des Balkans. Cependant, la BCE prend bien soin de préciser qu'elle "ne cherche ni à favoriser ni à prévenir la mise en place de caisses d'émission (currency board)". C'est qu'il y aurait en effet un certain paradoxe à accepter ce régime de change très voisin de l'euroïsation et simultanément à refuser l'euroïsation unilatérale. Un currency board peut apparaître comme une forme d'euroïsation, certes affaiblie mais manifestement unilatérale. On est alors en droit de s'interroger sur les raisons qui poussent la BCE à la fois à interdire l'euroïsation unilatérale officielle et à manifester beaucoup de réserves à propos du succédané d'euroïsation unilatérale que constitue un currency board [16].
Pour conclure, le régime d'adhésion des pays candidats à l'UEM peut sembler alléger la contradiction signalée initialement entre convergences nominale et réelle puisque, l'enjeu de l'adoption de l'euro disparaissant, la convergence nominale perd de son importance et la convergence réelle seule bénéficie d'une priorité. Telle est du moins la logique des autorités européennes, ou ce que l'on peut en reconstituer. En adoptant une attitude de "neutralité négative" vis à vis de l'adoption de l'euro - attitude que l'on pourrait décrire comme : "vous n'êtes pas du tout obligé d'adopter l'euro et vous pouvez conserver votre régime de change quel qu'il soit, fixe, flexible ou intermédiaire ; si vraiment vous voulez l'euro, passez l'examen et nous vous donnerons le résultat" -, la BCE et la Commission semblent répondre à l'inquiétude (supposée) que l'adhésion à l'UEM pourrait gêner la convergence réelle [17].
D- Les politiques de change des PECO jusqu'à l'adhésion
La Commission et la BCE doivent également adopter une position unique vis à vis de douze pays candidats (et peut-être encore d'une dizaine d'autres qui pourraient apparaître d'ici quelques mois ou années) qui présentent une très grande variété. F. Coricelli, B. Jazbec et I. Masten montrent dans ce numéro à quel point les stratégies de change de quatre pays - la Slovénie, la Tchéquie, la Hongrie et la Pologne - ont été diverses et changeantes au cours des dix dernières années. Variété du point de vue de leurs degrés de convergence réelle, mais aussi variété du point de vue de leurs politiques de change, ces dernières étant les points de départ multiples d'une convergence nominale théorique qui pourrait amener un jour tous ces pays à l'adoption de l'euro. Cependant, malgré des situations diverses au moment de l'adhésion, il semble qu'il existe une tendance commune que l'on peut tenter de retracer [18].
A l'aube de la transition de presque chacun des pays aujourd'hui concernés par l'élargissement, c'est une stratégie d'ancrage nominal du taux de change qui a été choisie. Cette stratégie de change a permis de maîtriser dans la plupart des cas la très forte inflation qui a accompagné la libération soudaine des prix, et ceci sans passage à l'hyperinflation. La transmission du régime de change à l'inflation s'est opérée par plusieurs canaux : la réduction du prix des biens importés due à l'appréciation du taux de change réel ; la réduction des anticipations inflationnistes grâce à la crédibilité de la politique monétaire ; la nécessité d'une politique monétaire restrictive qui comprime la demande. Plusieurs modalités de fixation du taux de change ont été mises en œuvre dans les différents pays : currency board, simple fixation du taux de change avec des bandes étroites, crawling peg. C'est ainsi que la Pologne a fixé son taux de change (par rapport au dollar) du 1-er janvier 1990 à août 1991, puis est passée jusqu'en 1998 à un crawling peg (basé sur un panier composé de dollar et d'euro). La République tchèque a fixé son taux de change en 1991, jusqu'à mai 1997. La Slovaquie a maintenu son taux de change fixe (partagé au départ avec la Tchéquie) jusqu'en octobre 1998. La Hongrie a adopté dès 1990 un crawling peg basé sur un panier mixte dollar-euro, qui est passé complètement à l'euro en janvier 2000. Les pays baltes ont adopté en 1992 ou 1993 des currency board qui fonctionnent tous sans à-coups depuis leur création : pour l'Estonie, il est basé sur le Deutsche Mark depuis juin 1992, et est passé automatiquement à l'euro en 1999 ; en Lituanie, il était basé sur le dollar depuis 1994 et est passé à l'euro en février 2002 ; en Lettonie, la devise est étroitement ancrée sur le DTS depuis 1997 (un ancrage à l'Euro est envisagé au 1er janvier 2005). Finalement, seule, la Slovénie, du fait qu'elle ne disposait pas de suffisamment de réserves de change, n'est jamais passée par un système de parités fixes (ou à crémaillère). La même stratégie s'est imposée à la Roumanie et à la Bulgarie jusqu'en 1997, date à laquelle ce dernier pays adopte un currency board.
Dans tous les cas, les stratégies d'ancrage du change nominal s'accompagnaient d'une convertibilité limitée de la monnaie (convertibilité en compte courant), et supposaient des disponibilités en devises suffisantes. C'est pour passer à un degré de convertibilité plus poussé, autorisant la libération des mouvements de capitaux, que les stratégies de fixation du taux de change ont été assouplies à partir de 1998. Ce changement était en effet nécessaire pour tous les pays qui devaient assumer l'Acquis communautaire dont le chapitre 4 prévoit justement "la libre circulation des capitaux". Il est clair qu'un régime de taux fixe ne peut subsister dans des pays émergents sans attirer des risques d'attaque spéculative qu'à la condition de maintenir un contrôle sur les mouvements de capitaux ; symétriquement, libéraliser ces mouvements implique de passer à un taux flexible. Cet assouplissement s'est fait parfois de façon progressive, par un élargissement des bandes de fluctuation autour du crawling peg [19] ou du taux fixe, ou par la mise en flottement de la monnaie, et dans tous les cas il s'est accompagné d'une libéralisation des mouvements de capitaux. Ainsi la Pologne a-t-elle élargi les bandes de fluctuation de son crawling peg à ±7 puis ±15% en 1998 et 1999, avant de passer à un flottement complet en avril 2000. La Hongrie a réalisé une opération similaire en avril 2001 en élargissant ses bandes de ±2,25 à ±15%, tout en revenant du crawling peg à une parité fixe par rapport à l'euro. La Slovaquie a également élargi ses bandes de fluctuation à ±15% autour de sa parité fixe en octobre 1998, mais n'a libéré ses mouvements de capitaux qu'à la fin de 2002 ; en mai 1999 et pendant l'été 2002, ce pays a été l'objet d'entrées massives de capitaux suite aux privatisations et la Banque centrale est intervenue fortement pour empêcher une appréciation excessive de la couronne, si bien que la Koruna s'est maintenue dans des bandes implicites de ±3%. Quant à la République tchèque, après un premier élargissement précoce de ses bandes de fluctuation, elle a été l'objet d'attaques spéculatives en mai 1997, attaques causées par un effet de contagion avec la Thaïlande dont la situation était similaire : taux de change maintenu fixe pendant plusieurs années, déficit courant proche de 8% du PIB, importantes rigidités résiduelles sur les marchés du travail et des biens, traduisant une possible surévaluation de la devise. C'est alors " à chaud " que la couronne tchèque a été mise en flottement sans affichage de cible de change, situation dans laquelle le pays se trouve en 2004. Dans des circonstances similaires mais beaucoup plus graves (perte de contrôle totale et crise hyper-inflationniste), la Bulgarie a opté pour un currency board basé sur le Deutsche Mark en juillet 1997. La Slovénie a pour sa part combiné une gestion active de son flottement avec un contrôle sur les mouvements de capitaux, contrôle qui n'a été levé qu'à la fin de l'année 2002, date butoir de la mise en conformité avec l'Acquis. Enfin, les trois pays baltes ont maintenu leur currency board avec les aménagements mentionnés précédemment.
On met souvent en avant un autre motif de l'abandon des parités fixes par les PECO, qui résiderait dans la perte de compétitivité progressive qui minerait graduellement tous les régimes à taux fixes y compris les crawling peg ; le maintien d'un taux de croissance du taux de change inférieur au taux d'inflation provoque une appréciation du taux de change réel qui peut dans certains cas détériorer la balance commerciale et mettre ainsi en évidence une surévaluation de la monnaie. Les deux phénomènes d'appréciation réelle et de déficit commercial sont pourtant deux phénomènes naturels dans le contexte de la transition. Le déficit commercial résulte du développement économique rapide et trouve son financement dans les flux de capitaux et notamment au travers des investissements directs favorisés par la privatisation et le dynamisme de la création d'entreprises. J. de Sousa et J. Lochard montrent dans ce numéro que, dans le cas des pays de la cohésion, les investissements directs ont reçu une impulsion supplémentaire du fait de leur appartenance à la zone euro. L'appréciation réelle résulte pour sa part d'une combinaison de l'effet Balassa-Samuelson et d'un rattrapage de niveau des prix. L'effet Balassa-Samuelson est dû aux retombées sur le secteur des non-échangeables des progrès de productivité réalisés dans le secteur des échangeables : à prix international donné, le salaire augmente dans ce secteur et le salaire dans le secteur des non-échangeables s'aligne, déterminant alors une hausse du prix des services. Par ailleurs, le niveau des prix domestiques était largement sous-évalué au début de la transition, réservant ainsi des possibilités de hausse très significatives [20]. C'est ainsi qu'en Estonie, avec un taux de change resté parfaitement stable par rapport à l'euro depuis juin 1992 (currency board), les prix à la consommation ont été multipliés par 6 en dix ans [21], sans que cela reflète une perte de compétitivité majeure. Il n'en reste pas moins que ces perspectives de rattrapage de prix sont peu compatibles avec les critères de Maastricht [22].
Certes, on a rappelé ci-dessus le cas de la République tchèque qui a subi des attaques spéculatives en 1997, mais on remarque a posteriori que son taux de change nominal par rapport à l'euro est resté assez stable sur la période 1993-2001, avant de s'apprécier de 10% à partir de 2002. Dans quel cas pourrait-il y avoir surévaluation du taux de change ? Uniquement en cas de rigidité sur le marché des biens, de telle sorte que le prix des biens échangeables domestiques en monnaie locale se maintienne durablement au-dessus du prix international converti en monnaie locale au taux de change courant ; avec comme facteur déclenchant un excès de demande provenant d'un déficit budgétaire ou de crédits bancaires excessifs. De telles situations monopolistiques existent (en particulier en Roumanie, qui n'a d'ailleurs jamais tenté de fixer son taux de change) ou ont existé (Bulgarie jusqu'à la crise et l'établissement de son currency board), mais dans l'ensemble, on peut considérer que bien que les marchés des biens et du travail soient déjà relativement flexibles dans les PECO adhérents [23], ils sont en voie de flexibilisation au moyen de programmes de déréglementation appliqués à tous les secteurs qui le nécessitent encore. On ne peut donc retenir la "perte de compétitivité" comme un argument expliquant la sortie des systèmes de taux fixes. La meilleure preuve - jusqu'à présent - du fait que le régime de taux fixes n'a pas conduit à une surévaluation des taux de change est que le passage à des taux flexibles ne s'est traduit nulle part par des dépréciations significatives.
Au total, les PECO qui avaient adopté des taux de change fixes au début de leur transition se répartissent à la veille de l'adhésion officielle en deux catégories. D'un côté, les pays baltes (et la Bulgarie) ont maintenu leur système de currency board et l'ont adapté quand c'était nécessaire à la perspective de l'entrée dans le mécanisme de change. D'un autre côté, la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie ont assoupli leur régime de change vers la fin des années 90 pour faciliter la levée des contrôles sur les mouvements de capitaux, ceci dans la perspective de leur adhésion à l'UE. La Slovénie avait déjà un régime de change souple et a aussi levé ses restrictions sur les mouvements de capitaux. Cependant, à un peu plus long terme, et cette fois dans la perspective de leur participation au mécanisme de change, ces pays souhaitent à la fois stabiliser leur taux de change et limiter leur taux d'inflation. Le retour à la stabilité des taux nominaux s'observe dès maintenant en Hongrie, en Slovaquie et en République tchèque ; les Banques centrales fixent des cibles d'inflation et de fait, les performances d'inflation se sont améliorées en 2002 et 2003 : en moyenne, les PECO adhérents ont une inflation inférieure à 3%. Mais ces performances sont-elles durables ? Peuvent-elles l'être compte tenu du rattrapage nécessaire des prix ? Les PECO ne risquent-ils pas de maquiller leur déficit budgétaire - qu'il est assez facile d'alléger temporairement en recourant au report de dépenses, aux fonds extra-budgétaires ou aux subventions cachées dans des mauvais prêts bancaires [24] - ou de différer des hausses de tarifs publics de façon à limiter l'inflation pendant la période d'examen, afin d'accéder à l'UEM ?
Après l'adhésion : quelle stratégie de change pour les nouveaux membres ?
Dans le régime d'accession à l'UEM qui a été construit par la BCE et la Commission, il y a une hypothèse implicite simple qui est que les candidats doivent atteindre un certain degré de convergence préalable - à la fois nominal et réel - et que cette convergence peut être obtenue par des mesures discrétionnaires de politique économique. L'hypothèse est que le résultat visé - les effets bénéfiques d'une zone monétaire optimale (ZMO) - est une conséquence finale de conditions objectives et de mesures discrétionnaires initiales, celles-ci étant par définition exogènes. Or une littérature économique s'est développée depuis plusieurs années sur le thème de l'endogénéité des ZMO. Frankel et Rose (1998) ont ainsi montré que des relations commerciales plus intenses entre pays appartenant à une même entité peuvent contribuer à rendre leur cycle économique synchrone alors qu'avant leur réunion, ils divergeaient : créer la ZMO conduit à faire apparaître les conditions de sa réalisation.
Ce thème s'applique doublement au problème de l'élargissement. D'une part parce que les conditions qui ont été fixées pour passer à l'euro - le respect des critères de Maastricht pendant deux années de mécanisme de change - se fondent sur la vision classique de la théorie des zones monétaires optimales ; d'autre part parce que comme le montrent les textes rassemblés dans le présent numéro, la convergence apparaît bien davantage comme un résultat de l'intégration plutôt que comme une condition préalable. Cette thématique des relations complexes entre convergence nominale, convergence réelle et intégration monétaire donne lieu à plusieurs débats qui apparaissent dans les articles qui suivent.
E- Présentation des articles
On trouve tout d'abord la question, rappelée par M. Maurel au début de sa contribution, de ce qu'a dit réellement Mundell [25]. Selon l'interprétation classique, basée sur la célèbre contribution de 1961, pour qu'une zone monétaire soit optimale, c'est à dire pour que deux pays partagent une même monnaie ou aient un taux de change fixe, ou bien il faut que les prix et les salaires soient flexibles et le travail mobile, se substituant à la politique économique en cas de choc asymétrique, ou bien il faut que les chocs soient toujours symétriques. Dans ces conditions, l'économiste va vérifier que les PECO ont des cycles synchrones avec ceux de l'UE, et va en tirer une conclusion péremptoire sur la possibilité ou non de faire appartenir les PECO à l'UEM. Pourtant, il existe une autre contribution moins célèbre de Mundell (1973), dont la lecture pourrait conduire à des conclusions diamétralement opposées. Dans sa seconde contribution, Mundell montre comment le partage d'une monnaie commune peut atténuer des chocs par une mise en commun des réserves de change et la diversification du portefeuille. " Une mauvaise récolte, des grèves, une guerre dans l'un des pays cause une perte de revenu réel, mais l'utilisation d'une monnaie commune (...) permet au pays de dépenser ses disponibilités monétaires et d'amortir l'impact de la perte en tirant sur les ressources de l'autre pays jusqu'à ce que le coût de l'ajustement soit étalé efficacement dans le temps. Si par contre les deux pays ont des monnaies séparées avec un taux de change flexible, alors la perte doit être subie individuellement " ; avec des monnaies séparées, le coût des chocs est enfermé dans chaque pays. M. Maurel élargit alors cette vision de la monnaie à l'ensemble des actifs financiers et propose d'estimer le potentiel de partage du risque qui dépend du degré d'intégration financière. Il y a intégration financière parfaite si dans un pays donné l'investissement est totalement indépendant de l'épargne, et au contraire, un pays sera peu intégré financièrement s'il doit financer son investissement avec sa propre épargne. Un test simple montre alors que les pays de l'UE sont intégrés financièrement depuis 1995 alors que les PECO ne le sont pas (et gagneraient évidemment à l'être). Par ailleurs l'intégration financière réduit l'efficacité des politiques monétaire et fiscale, quel que soit le régime de change, et on constate empiriquement que plus les pays candidats sont intégrés financièrement, plus ils ont tendance à adopter des régimes de change fixe. On retrouve alors les conclusions du second Mundell.
Intégration financière et régimes de change dans les pays candidats
Ce que disent les critères de Mundell, c'est que des pays ont intérêt à constituer une union monétaire si leurs cycles sont corrélés, ou s'ils ont à leur disposition la flexibilité du travail pour ajuster des chocs asymétriques. Les études empiriques ont tendance à montrer que bien que convergents, les chocs, notamment d'offre, sont faiblement corrélés. Cet article s'interroge sur une question symétrique et néanmoins essentielle : si la participation à l'Union monétaire européenne (UME) est coûteuse, que gagnent les Pays d'Europe centrale et orientale (Peco) à rester en dehors ?
Le point de départ de l'article est une contribution de Mundell (1973) moins connue que celle, publiée dans l'American Economic Review (1960), qui a établi les critères des zones monétaires optimales. Mundell (1973) inverse le critère le plus important selon lequel les chocs asymétriques sont une raison de ne pas constituer une Union monétaire, car il vaut mieux alors conserver chacun sa propre politique monétaire en plus des ajustements internes sur le marché du travail. Il affirme qu'au contraire plus les pays sont petits et asymétriques, plus ils ont intérêt à entrer dans des unions monétaires constituées de pays qui partageront les coûts en cas d'événement défavorable. Les Peco sont en effet de petites économies périphériques et émergentes si on les compare à leur puissant voisin ouest-européen.
Plus le potentiel d'intégration financière est important, plus la participation à l'UME est bénéfique. On peut estimer ce potentiel en comparant la mobilité du capital dans l'UME et entre les pays de l'UME et les Peco. On montre qu'alors qu'elle est parfaite dans le premier cas, il y a des obstacles aux échanges de capitaux entre l'Est et l'Ouest, qui peuvent s'expliquer tout simplement par l'existence d'une prime de risque et de change.
Dans un monde caractérisé par un degré d'intégration financière croissante, l'autonomie de la politique économique est un leurre. Les Peco peuvent choisir soit de fixer leurs monnaies, soit de la laisser flotter complètement. Mais dans le contexte politique d'élargissement de l'UE et de nécessité d'adopter le chapitre monétaire de l'Acquis Communautaire, c'est l'ancrage à l'euro qui est choisi.
Le second débat est rappelé par J. Babetski et concerne la synchronisation des cycles et l'intégration économique. Il existe deux points de vue opposés sur ce thème : d'après P. Krugman (1993), l'intégration économique se traduit par une spécialisation accrue et conduit à ce que des chocs extérieurs frappent les pays composant l'ensemble intégré de façon de plus en plus idiosyncratique. A cela s'oppose la "position de la Commission" (1990) selon laquelle l'intégration économique renforce au contraire la similarité des structures de production entre pays composants, ce qui ne saurait conduire à autre chose qu'à une plus forte corrélation des chocs exogènes. Le débat est d'importance puisqu'il suggère que l'intégration monétaire - dans une perspective Mundelienne classique - pourrait entrer en contradiction avec l'intégration économique. Notons que dans les deux branches de l'alternative, le critère de la zone monétaire optimale est endogénéisé : la symétrie comme l'asymétrie des chocs résulte de l'intégration, alors que la vision "exogène" orthodoxe serait que l'intégration résulte d'un constat de symétrie des chocs. J. Babetski propose alors de tester ces propositions sur les données des PECO et de l'UE (ou de l'Allemagne considérée comme représentative de l'ensemble) : quel est le degré de symétrie des chocs entre l'Union européenne et les pays candidats ? Pour répondre, il propose d'utiliser un modèle VAR bivarié permettant d'identifier des chocs d'offre (qui ont un effet durable) et de demande (qui ont un effte passager) [26] ; de plus, il distingue entre les chocs et les réactions aux chocs. En résultat, la symétrie des chocs de demande augmente quand l'intensité des échanges (l'intégration économique) augmente, et une baisse de la volatilité des taux de change (l'intégration monétaire) se traduit par une convergence des chocs de demande. Au total, l'intégration économique et monétaire tend à réduire l'asymétrie entre les pays.
L'adhésion des PECO (Pays d'Europe centrale et orientale) à l'Union européenne et l'endogénéité des chocs d'offre et de demande
Il y a un débat important sur le lien entre intégration économique et synchronisation des cycles économiques. Selon De Grauwe (1997), deux points de vue coexistent : Pour la Commission (1990), une intégration économique plus étroite entraîne une moindre fréquence des chocs asymétriques, et des cycles économiques mieux synchronisés entre pays. Pour Krugman (1993) en revanche, une intégration plus étroite entrâine une plus forte spécialisation, qui se traduit par un risque plus élevé de chocs asymétriques. L'impact global de l'intégration économique sur la symétrie des chocs pourrait donc se révéler ambigu, au moins en théorie. Les modèles formalisés modernes des zones monétaires optimales ne semblent pas, non plus, donner une réponse univoque.
Basé sur les données d'un groupe de pays en transition dont les échanges avec l'UE se sont considérablement accrus dans les dix dernières années, le présent article cherche à déterminer lequel de ces deux arguments est corroboré par les données. Comme les échanges commerciaux des PECO avec la Communauté ont augmenté de manière significative au cours de la période de transition, et que plusieurs pays candidats ont fixé leurs monnaies nationales par rapport au mark allemand, ultérieurement remplacé par l'euro, nous avons devant nous une sorte d'expérience naturelle pour tester l'impact de l'intégration sur la symétrie des chocs macroéconomiques.
Le point de vue de la Commission (1990) est également est repris par Frankel et Rose (1998) qui l'inscrivent dans la théorie des zones monétaire optimales (ZMO). La théorie des ZMO établie des critères, selon lesquels deux pays ou régions gagnent à la création d'une union monétaire. En particulier, plus les cycles économiques de deux pays sont synchronisés, et plus ils sont intégrés commercialement, moins il est coûteux pour eux de partager une politique monétaire commune. Or on sait qu'une union monétaire favorise les échanges commerciaux, et qu'elle augmente la symétrie des chocs. L'argument d'endogénéité veut dire que si l'asymétrie des chocs et l'intégration commerciale ont un impact sur la probabilité de créer une union monétaire, à l'inverse cette dernière détermine l'asymétrie des chocs et l'intensité des échanges commerciaux.
Un certain nombre d'études cherchent à mesurer le degré d'asymétrie des chocs entre pays. En ce qui concerne les pays candidats, des études empiriques n'ont commencé à apparaître que récemment, au moment où des séries suffisamment longues dans le temps deviennent disponibles. Les données indiquent que quelques PECO ont atteint une certaine synchronisation de leurs cycles commerciaux avec l'UE, au moins du côté de la demande. Toutefois, il est en général souligné que la période de transition est trop courte pour permettre de tirer des conclusions sérieuses. Pour cette raison, nous concentrons nos efforts sur l'analyse de la sensibilité au choix des pays, périodes, et schémas d'identification. En suivant la méthodologie de Blanchard et Quah (1989), nous distinguons deux types de chocs, ceux d'offre et de demande. Une fois que les chocs sont identifiés, nous nous appuyons sur la méthodologie de Boone (1997) qui permet d'analyser leur évolution dans le temps, et de dire s'ils convergent ou pas. Les résultats démontrent qu'il y a convergence des chocs de demande et divergence des chocs d'offre entre les pays candidats d'une part, et l'EU à 15 et l'Allemagne, d'autre part.
On dit souvent que c'est l'intégration qui permet de comprendre les mouvements concomitants des cycles économiques. Or, cette variable potentiellement explicative est souvent absente de l'analyse. Elle est traitée explicitement dans cet article, qui confronte l'évolution des chocs d'offre et de demande avec des indicateurs de commerce et de taux de change. Nous constatons (i) que l'augmentation de l'intensité des échanges est accompagnée d'une plus grande symétrie des chocs de demande, mais que pour les chocs d'offre les résultats sont ambigus; (ii) qu'une baisse de la volatilité des taux de change a un effet positif au niveau de la convergence des chocs de demande, et pas d'impact significatif sur les chocs d'offre.
Les résultats pour les chocs de demande peuvent être interprétés en faveur de la position de la Commission, qui reprend en fait l'argument d'endogénéité de Frankel et Rose (1998) dans la discussion sur les critères de la zone monétaire optimale, et selon lequel les liens commerciaux et l'intégration monétaire réduisent l'asymétrie des chocs entre pays. D'une manière générale, nos résultats valident le point de vue de Kenen (2001), qui dit que l'impact de l'intégration commerciale sur l'asymétrie des chocs dépend des types des chocs.
Toutefois, il y a un certain nombre de considérations qui suggèrent que les résultats doivent être interprétés avec prudence. D'abord, la méthodologie utilisée ne distingue pas les perturbations d'offre ou de demande causées respectivement par des chocs domestiques ou extérieurs. Ainsi, il n'y a pas de consensus dans la littérature sur la question de savoir lesquels des chocs - ceux d'offre ou ceux de demande - sont plus pertinents pour évaluer les coûts d'adhésion à l'Union monétaire européenne (UME). De plus, l'importance des critères de ZMO pour analyser l'opportunité d'adhésion à une union monétaire ne doit pas être exagérée. Le degré de symétrie des chocs n'est qu'un coût parmi d'autres de l'adhésion à une union monétaire. Celle-ci peut générer d'autres coûts, au moins aussi importants que la diversité des chocs. Les asymétries substantielles qui existent encore, en termes de chocs, entre les pays membres de l'UME semblent indiquer que ce n'est probablement pas ce critère-ci qui est le plus important.
Le texte suivant, de F. Coricelli, B. Jazbec et I. Masten, porte sur l'influence des régimes de change sur la performance inflationniste. Il défend l'idée selon laquelle le flottement des monnaies se traduit par plus d'inflation, et la flexibilité du taux de change, loin d'être un "absorbeur de chocs", est plutôt un producteur de chocs ; on retrouve donc ici aussi un autre aspect du débat sur l'endogénéité des ZMO. Les auteurs se penchent sur quatre PECO adhérents : Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovénie. Ils retracent un historique rapide des régimes de change de la période d'ancrage à celle de flexibilisation ; ce dernier mouvement a-t-il contribué à mieux répondre aux chocs ? Il faut pour répondre à cette question savoir si cette flexibilité correspond à une politique ciblant l'inflation, ou bien à une politique "accomodante" visant à stabiliser le taux de change réel ; dans un tel cas (typique de la Slovénie), il y a endogénéisation des anticipations inflationnistes et on tombe rapidement dans un cycle dépréciation / inflation ; les auteurs dénomment ce phénomène la "transmission" du taux de change à l'inflation. Dans les quatre pays étudiés, il y a une forte "transmission", mais deux cas sont à distinguer : d'un côté la Pologne et la République tchèque qui ont des cibles d'inflation et obtiennent de fait un niveau d'inflation faible, et de l'autre côté la Slovénie et la Hongrie qui mènent une politique de stabilisation du taux de change réel et subissent de ce fait une inflation plus forte (de l'ordre de 6-8%). Les auteurs développent une économétrie basée sur un modèle SVAR, en introduisant l'hypothèse que les prix et les taux de change ne sont pas des variables intégrées d'ordre 1 (ce qui voudrait dire par exemple que le taux d'inflation est stationnaire) mais d'ordre 2. Cette méthode leur permet d'identifier la "transmission" et de l'estimer pour chacun des quatre pays. La conclusion de politique économique des auteurs est que la phase de pré-adoption de l'euro (donc la participation au mécanisme de change) pourrait se traduire par une sorte d'incitation des pays à rechercher un ajustement permanent inflation / dépréciation afin de maintenir le taux de change réel. Les auteurs recommandent alors une euroïsation rapide.
L'influence du régime de change sur l'inflation dans les Pays Adhérents
Depuis le début des années 90, l'inflation est un sujet de préoccupation récurrent dans les pays d'Europe centrale et orientale (PECO). Après la hausse initiale du niveau des prix associée à leur libéralisation, l'inflation a baissé graduellement dans les PECO. Le passage à une inflation à un chiffre a été beaucoup plus rapide dans certains pays, tels que la Slovénie et la République tchèque, moins affectés par d'importants stocks de dette et la nécessité d'en financer le service. Cependant, l'inflation semble persister plus longtemps en Slovénie et en Hongrie qu'en République tchèque et en Pologne. Ces 3-4 dernières années, elle est restée autour de 6-8 % en Slovénie et en Hongrie, avec un certain ralentissement à partir du second semestre 2002, dû à la mauvaise conjoncture économique.
La baisse graduelle de l'inflation s'est accompagnée d'une appréciation considérable du taux de change réel dans tous les PECO, et d'ailleurs dans toutes les économies en transition. On peut considérer qu'une composante de cette tendance est conforme à l'effet Balassa-Samuelson, qui affecte l'inflation et le taux de change réel dans la phase de rattrapage. Un processus dynamique additionnel connectant les taux de change et l'inflation semble cependant exister. Différentes dynamiques de l'inflation dans les PECO devraient ainsi être associés à différents régimes de change.
Cet article analyse le lien entre le choix du régime de taux de change et la performance inflationniste dans quatre pays nouveaux membres de l'UE : la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie.
Le taux de change était l'ancre nominale principale dans la plupart des économies en transition. Pour freiner l'inflation et maintenir la stabilité macro-économique, les PECO ont introduit des programmes de stabilisation basés sur les taux de change au début des années 90. Au cours du temps, certains PECO qui avaient fixé leur taux de change, se sont déplacés vers un régime plus flexible. Reste à savoir si un mouvement vers des régimes de change plus flexibles a aidé les économies en transition à mener une politique monétaire indépendante et à répondre plus efficacement aux chocs.
Pour répondre à cette question, il est important de distinguer les cas où la flexibilité du taux de change reflète une politique de change visant la réalisation d'une certaine cible d'inflation, et les cas où la politique de change est "accommodante", c'est à dire qu'elle essaye de neutraliser les effets de chocs défavorables sur le taux de change réel. Dans ce dernier cas, on obtient un "effet de transmission du taux de change" désignant la variation de l'indice des prix causée par un changement du taux de change nominal. On observe ainsi une forte corrélation entre les mouvements du taux de change et les taux d'inflation dans les régimes de flottement contrôlé.
L'analyse empirique indique que l'effet de transmission est fortement significatif dans les quatre pays candidats examinés, mais il y a des différences importantes entre eux. Celles-ci peuvent être associées aux régimes de change. Tandis que la Slovénie et la Hongrie se sont engagées dans des politiques de change relativement contrôlées, la République tchèque et la Pologne ont laissé leur taux de change flotter plus librement, au moins récemment. De plus, la République tchèque et la Pologne ont introduit des cibles d'inflation qui ont aidé les autorités monétaires à maintenir l'inflation à des niveaux inférieurs à ceux de la Slovénie et la Hongrie. À cet égard il n'est pas surprenant de trouver une transmission parfaite du taux de change à l'inflation domestique en Slovénie et en Hongrie. Un impact beaucoup plus faible a été trouvé pour la Pologne et surtout pour la République tchèque. De même, en Slovénie les chocs de taux de change jouent le rôle principal dans les pressions inflationnistes. Ainsi, bien que la Slovénie ait apparemment de bons fondamentaux, elle a été incapable de réduire l'inflation au-dessous de 6-8 % dans les cinq dernières années.
Les résultats permettent donc un classement clair des pays selon l'intensité de la transmission (ou selon le degré d'influence) et l'importance des chocs de taux de change sur la performance inflationniste globale. En particulier, une transmission parfaite, associée à une politique de taux de change accommodante, peut devenir une source importante de pressions inflationnistes. L'analyse suggère que pour les quatre PECO étudiés une adoption rapide de l'Euro fournirait le moyen le plus efficace de réduire l'inflation.
Le quatrième texte présenté dans ce numéro, par A. Belke et R. Setzer, se situe également dans la thématique de l'endogénéisation des critères de ZMO. La question qui est posée ici est d'explorer les relations entre la variabilité (ou volatilité) du taux de change d'une part et le niveau du taux de chômage de l'autre. Plusieurs études ont montré que, à travers le commerce, la variabilité des taux de change à l'intérieur de l'Europe jouait positivement sur le chômage, c'est à dire qu'une variabilité plus forte se traduisait par plus de chômage ; ce résultat a d'ailleurs joué un rôle dans l'adoption de l'euro. Le même mécanisme a été mis en évidence pour l'ensemble Etats Unis - Europe, ainsi que pour les pays du Mercosur. Intuitivement, ce constat s'explique : quand on investit ou quand on embauche, on prend des décisions irréversibles dans un environnement caractérisé par de fortes rigidités structurelles ; il est alors naturel qu'une plus grande volatilité du taux de change, par l'incertitude qu'elle crée, décourage ces décisions d'investissement et d'embauche. Inversement, dans le contexte de l'élargissement, il y aurait donc un coût à laisser flotter les monnaies des pays candidats. Les auteurs produisent alors une étude empirique qui confirme cet effet, en particulier pour les économies les plus intégrées commercialement à la zone euro telles que la République tchèque, pour lesquelles la liaison entre variabilité du taux de change et chômage est très significative. Il y aurait donc un gain pour les pays adhérents à accélérer l'adoption de l'euro. Si l'on admet, comme le font les auteurs, qu'une plus grande flexibilité du marché du travail est créatrice d'emplois, alors l'adoption de l'euro aurait en termes de création d'emploi des effets comparables à la suppression des rigidités sur le marché du travail. Ce résultat est donc inverse des conclusions classiques de la théorie des zones monétaires optimales, selon lesquelles la flexibilité du marché du travail est un substitut à la flexibilité du taux de change.
Incertitude sur le taux de change et chômage dans les pays candidats: un argument pour l'euroization?
La transition vers l'économie de marché en Europe centrale et orientale s'est accompagnée d'une chute importante de l'emploi. Depuis, même si des améliorations relatives ont été enregistrées dans certains pays, la réduction du chômage est toujours restée modeste par rapport aux attentes. Ainsi, la Slovaquie, la Pologne ou la Bulgarie conservent des taux de chômage supérieurs à 15%. Ceci s'explique notamment par les rigidités structurelles des marchés du travail dans les pays candidats qui, combinées à la restructuration en cours, limitent les réductions du taux de chômage.
Dans cet article, les auteurs tentent de comprendre dans quelle mesure la variabilité du taux de change peut être rendue responsable de l' " évolution négative " des marchés du travail dans les pays d'Europe centrale et orientale (PECO). L'analyse de l'impact de la volatilité du taux de change sur les marchés du travail a des conséquences importantes pour le débat portant sur les régimes de change dans les PECO. En effet, l'admission des huit PECO dans l'Union européenne (UE) implique aussi formellement l'adhésion à l'union monétaire, bien que la date de cette adhésion ne soit pas fixée. Certains pays comme la Slovénie ou les Pays baltes ont exprimé le souhait d'intégrer la zone euro aussi rapidement que possible. Quand l'euro doit-il être introduit dans ces pays ? Comment assurer une transition douce vers l'euro ? Certain, et notamment les fonctionnaires ouest-européens, mettent en avant les risques d'une euroization unilatérale. Mais, l'adoption de l'euro avant l'ent!rée dans l'Union monétaire européenne (UME) peut avoir des effet bénéfiques, notamment en réduisant le chômage.
De nombreuses études mettent en avant l'impact négatif de la volatilité du taux de change sur les volumes de commerce. Belke et Gros (2002a) montrent, dans le cadre d'un projet pour la Commission européenne, que la variabilité du taux de change a également des effets négatifs sur le marché du travail au niveau global. Les résultats indiquent aussi que la variabilité du taux de change transatlantique a un impact négatif significatif sur le marché du travail dans l'UE, et probablement aussi aux Etats-Unis. Les auteurs appliquent la même approche aux pays émergents formant le Mercosur (Belke et Gros (2002b)).
Le lien entre variabilité du taux de change et marchés du travail n'est ni évident, ni direct. Pour justifier cette relation, les auteurs partent de l'hypothèse que l'exportation de biens et services implique des coûts fixes dus à des investissements irréversibles dans le processus de production, tels que les coûts d'installation de la distribution dans les marchés à l'export. Si le taux de change est incertain, une appréciation défavorable de la monnaie est susceptible d'engendrer des pertes importantes, et les firmes peuvent choisir de différer l'embauche, même si elles sont neutres vis-à-vis du risque. L'impact de la volatilité du taux de change dépend alors du degré de rigidité qui caractérise le marché du travail. Si les rigidités sont importantes, la volatilité du taux de change pourra dissuader les entreprises d'embaucher. Les PECO sont au milieu de l'échelle de flexibilité des économies de l'OCDE, plus flexibles que les pays méditerranéens, la France ou l'Allem!agne mais moins flexibles que le Royaume-Uni, l'Irlande ou le Danemark. La volatilité du taux de change est donc susceptible d'affecter les marchés du travail dans les PECO.
Pour tester cette relation, les auteurs estiment l'impact de la volatilité du taux de change sur la variation du taux de chômage pour les dix PECO (République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie, Bulgarie et Roumanie) sur une période allant de 1990 à 2001. Quatre mesures de la volatilité du taux de change sont étudiées : la volatilité effective, nominale et réelle, par rapport aux 31 principaux partenaires commerciaux et la volatilité bilatérale du taux de change nominal et réel par rapport à l'euro (ou au deutschemark). Ils montrent que l'impact de la volatilité est en général faible mais non-négligeable. Les résultats indiquent également un effet souvent plus important pour la volatilité effective que pour la volatilité du taux de change bilatéral. Lorsque l'on affine l'analyse en considérant chaque pays pris séparément, il apparaît que l'impact de la volatilité effective est plus marqué en République tchèque, Lettonie, et Slov!aquie. Quant à la volatilité bilatérale, l'impact paraît systématique pour la République tchèque, la Hongrie et la Pologne, qui sont également les économies plus ouvertes par rapport à la zone euro.
Dans une deuxième étape, les auteurs tentent de vérifier les hypothèses du modèle en incluant dans les régressions des variables indicatrices de rigidité de la législation sur la protection de l'emploi. Les résultats indiquent que l'impact négatif de la volatilité du taux de change sur l'emploi est plus important lorsque les marchés du travail sont plus rigides. Plusieurs tests de robustesse sont également réalisés afin de vérifier la validité des résultats.
Les résultats mis en avant introduisent un élément nouveau dans le débat sur la politique de change des PECO. La fixation du taux de change dans ces pays pourrait atténuer les effets négatifs des rigidités du marché du travail sur le taux de chômage. Mais les avantages d'un taux de change fixe ne seront significatifs que si la volatilité ne réapparaît pas ailleurs, par exemple dans une variabilité accrue du taux d'intérêt. De plus, d'autres facteurs paraissent importants à prendre en compte avant d'invoquer une euroization immédiate.
D'un côté, avec des déficits de compte courant souvent importants, les PECO sont vulnérables aux attaques spéculatives. De l'autre côté, parce qu'ils sont dans un processus intense de changement structurel dont le résultat est difficile à prévoir, certains ont encore besoin de flexibilité dans leurs taux de change réels. Les coûts et les bénéfices des différents régimes de taux de change doivent donc être analysés au cas par cas.
Les deux derniers textes, par F. Toubal d'une part et J. De Sousa et J. Lochard d'autre part, abordent le thème des investissements directs étrangers dans les pays adhérents. Les deux contributions sont guidées par les développements récents de l'économie géographique qui reconstruit une théorie des firmes multinationales sur la base des effets d'agglomération et de délocalisation résultant d'un arbitrage entre rendements croissants de la production et coûts de transport des marchandises. Cette thématique n'est pas étrangère à celle des zones monétaires optimales : le régime de change (et la variabilité des taux) apparaît en effet comme une des variables importantes qui compose le "coût de transport" au sens large ; par ailleurs, les investissements directs sont un des moteurs les plus importants de la convergence réelle et une des questions qui se pose à leur sujet est de savoir s'ils doivent être considérés comme une condition mise à l'adoption de l'euro, ou si au contraire l'intégration monétaire n'est pas une condition de leur développement futur ; enfin, la poursuite d'un flux d'IDE significatif apparaît dans plusieurs pays candidats comme une condition du maintien de la stabilité monétaire au cours de la période de pré-adoption de l'euro (participation au mécanisme de change). Les IDE sont donc bien au cœur du problème de l'endogénéité des zones monétaires optimales, ils en constituent une des expressions les plus concrètes. De même que le texte de A. Belke et R. Setzer présenté précédemment posait la question de l'influence de la volatilité du taux de change sur le chômage, la question qui se pose maintenant est celle de l'influence du régime de change sur les IDE.
Localisation des firmes multinationales allemandes dans les pays d'Europe de l'Est (F. Toubal)
Par Farid Toubal (Université Christian-Albrechts de Kiel et Université Eberhard-Karls de Tübingen).
Témoins d'une spectaculaire intégration de l'économie mondiale, les dernières décennies ont été marquées par deux dynamiques interdépendantes : la globalisation croissante des économies européenne et l'intégration des pays d'Europe de l'Est à l'Union européenne. D'une part, l'impact de la globalisation sur les économies est lié à l'activité des firmes opérant davantage sur une échelle multinationale. Ces firmes acquièrent des filiales à l'étranger, déplacent en tout ou partie leurs processus productifs pour accéder à de nouveaux marchés ou pour bénéficier de la division internationale du travail. D'autre part, la libéralisation du commerce et de l'investissement entre les pays d'Europe de l'Est à l'Union européenne conduit à une relocation des activités productives au sein d'une union élargie. Les détracteurs de ce mouvement d'intégration affirment que les firmes multinationales déplacent leur processus productifs, et donc leurs emplois, dans les pays en transition pour y ex!ploiter les différentiels de coûts de production. Ceux qui le soutiennent, maintiennent que l'Investissement Direct Etranger (IDE) permet une meilleure allocation des ressources rares, le transfert de technologie et finalement améliore le bien être et la croissance.
Une analyse empirique des facteurs motivant la localisation des activités productives dans les pays de l'Est est donc nécessaire. Cette étude est d'autant plus importante que le stock des IDE européen dans les pays en transition s'est accru fortement durant les années 1990. Il atteint 83% du stock total en République Tchèque, et plus de 50 % du stock total en Roumanie. L'Allemagne est le plus important investisseur dans la région. Déjà à la fin des années 1990, 30% du stock des IDE européens en République Tchèque sont allemands, tandis qu'il constitue seulement 10% du stock des IDE européens en Roumanie. En effet, dès le début de la transition, les investisseurs allemands ont su distingués les pays les plus avancés sur leur trajectoire de transition, de ceux éprouvant des difficultés à gérer le changement structurel. Une analyse fine au niveau des firmes permet d'éclairer les motifs localisation des firmes multinationales allemandes dans les nouveaux pays membres. Doit!-on privilégier la demande ou les coûts de production comme déterminants des IDE à l'Est ? Certes pertinents, ces facteurs n'expliquent qu'en partie la distribution du stock des IDE allemands dans cette région. L'étude souligne l'importance des facteurs de transition notamment la privatisation et la méthode de privatisation pour expliquer la concentration spatiale des IDE allemand à l'Est.
Cet article enrichit la littérature sur les IDE à l'Est de plusieurs points de vue. Une analyse des données de panel est appliquée à la firme allemande pour exploiter toute l'information, longitudinale et temporelle, concernant ses investissements dans les pays en transition. Elle explore la relation bilatérale qui lie la firme mère allemande et ses filiales à l'Est. L'étude tente de discriminer entre les facteurs traditionnels influençant l'IDE et les facteurs dits de transition. La demande est un facteur traditionnel important, ainsi l'étude applique le concept de marché potentiel au IDE à l'Est. En effet, la localisation de la firme multinationale ne dépend pas seulement du marché domestique dans lequel elle investit mais dépend également de l'accessibilité aux marchés des pays voisins (Carstensen et Toubal, 2004. Cieslik et Ryan, 2001. Head et Mayer, 2001. Altomonte, 2002). Ceci est particulièrement important puisque l'élargissement de l'Europe aux pays de l'Est de!vrait réduire les barrières aux IDE mais aussi accroître l'accessibilité aux marchés. L'étude intègre ensuite les facteurs de transition ayant influencé la localisation des IDE. Elle étend les travaux de Lansbury et al. (1996) mais aussi de Holland et Pain (1998), en considérant l'impact des méthodes de privatisation sur l'IDE de la firme. Finalement, l'accès à la banque de données de la Deutsche Bundesbank permet une analyse sectorielle des déterminants des IDE allemands.
Dérivée de la nouvelle théorie du commerce internationale, la forme réduite estimée révèle que l'accessibilité aux marchés ainsi qu'une main d'oeuvre qualifié peu coûteuse sont des déterminants fort des IDE allemands. Au niveau sectoriel, ces déterminants jouent différemment selon que la firme investisse dans l'industrie manufacturière ou le secteur des services. Ainsi, l'accessibilité aux marchés a un impact plus que proportionnel dans l'industrie manufacturière alors que celui-ci reste marginal dans le secteur des services. Les coûts de production, par ailleurs, n'influence pas l'encours moyen de la firme allemande dans l'industrie manufacturière, suggérant que dans ce secteur les facteurs relatifs à la demande sont beaucoup plus importants. Ces déterminants n'expliquent cependant qu'en partie l'hétérogénéité de la distribution des IDE à l'Est. Des facteurs plus spécifiques à la transition tel que le niveau de la privatisation, les méthodes de privatisation, et le ri!sque-pays ont également influencé le choix de la localisation des firmes allemandes. Ainsi, c'est dans pays les plus avancés sur leur trajectoire de transition que le montant moyen de l'encours des firmes allemandes est le plus élevé, et ceci, quelque soit le secteur d'investissement.
L'impact de l'intégration économique et monétaire des pays en transition à l'Union nne sur l'IDE allemand est ambigu. Dans un premier temps, l'intégration économique a un impact positif sur leur marché potentiel. Elle accroît attractivité de ces pays en réduisant les barrières à l'échange et à l'investissement. Ceci devrait influencer positivement les IDE allemands dans la région. L'intégration monétaire future de ces pays, devrait réduire la volatilité des taux de change. Celle-ci a un impact déstabilisant sur la demande et les coûts de production. L'émergence d'un bloc monétaire aurait à son tour pour conséquence d'augmenter le niveau des IDE allemands dans les pays en transition. Cependant, le rattrapage économique de ces pays, en augmentant les coûts unitaires de travail, devrait réduire le stock des IDE dans ces pays.
Investissements directs étrangers et intégration: Quels enseignements pour les PECO ? (J. de Sousa et J. Lochard)
Par José de Sousa (ROSES)* et Julie Lochard (ROSES)*.
* : le laboratoire ROSES est depuis 2006 intégré au Centre d'Économie de la Sorbone (CES)
La Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie concentrent près de 60% des flux cumulés d'investissements directs étrangers (IDE) vers les pays en transition sur la période 1989-2001, soit plus de 88 milliards de dollars. Ces IDE représentent un enjeu crucial pour ces pays. Ils contribuent à accélérer le processus de transition dans les pays d'Europe Centrale et Orientale (PECO) et permettent de renforcer leur structure industrielle et sociale. Mais ces investissements internationaux sont en grande partie liés aux opportunités créées par la privatisation à grande échelle et l'une des craintes majeures des PECO est de voir le volume d'IDE se tarir à mesure que s'achève le processus de privatisation. Dans ce contexte, l'adhésion à l'Union européenne (UE) et l'adoption de l'euro pourraient limiter ces effets. Par conséquent, cet article propose d'évaluer empiriquement l'effet de l'intégration économique et monétaire sur l'investissement direct étranger dans le cas européen.
L'intégration économique est un processus graduel, dont la première étape est la réduction des barrières tarifaires et l'adoption d'un tarif extérieur commun. Ce processus peut ensuite s'étendre à la liberté de mouvement des capitaux et du travail, à la liberté d'installation des entreprises et à l'harmonisation des taxes et réglementations. L'intégration économique se traduit alors par deux effets ; d'une part, par une baisse des coûts de transaction sur les échanges de marchandises et, d'autre part, par une baisse des coûts, plus générale, affectant l'installation des firmes à l'étranger. Théoriquement, le second effet favorise sans ambiguïté les IDE, mais le premier est plus ambigu. Il dépend du motif de l'investissement (horizontal ou vertical), mais aussi de sa provenance et de sa destination. Ainsi, il apparaît nécessaire dans l'analyse de distinguer les investissements intra-régionaux, entre pays membres, et les investissements extra-régionaux, réalisés par des pays tiers à l'intérieur de la zone.
L'intégration monétaire constitue, à travers la création d'une union monétaire, une avancée supplémentaire dans le processus d'intégration régionale. L'union monétaire pourrait ainsi influencer la décision d'investir à l'étranger en réduisant le risque de change. Or, d'un point de vue théorique, l'impact de la volatilité du taux de change sur l'IDE est ambigu. Cependant, l'adoption d'une monnaie unique est un engagement plus important que tout autre régime de change. Elle implique, outre la stabilisation du taux de change, la suppression des coûts de conversion, une réduction de la prime de risque, une crédibilité renforcée de la politique monétaire et une plus grande coordination des autres politiques. Elle pourrait alors avoir un impact positif et important sur les IDE.
Les résultats théoriques sont donc pour le moins ambigus. Il est alors possible de chercher à mieux comprendre les effets induis par la mise en place d'une union économique et monétaire sur la localisation des firmes multinationales d'un point de vue empirique.
Dans cet article, nous évaluons l'impact des précédentes vagues d'élargissements de l'UE (entrée de l'Espagne et du Portugal en 1986 et de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède en 1995) et l'adoption de l'euro par 11 pays européens en 1999. La méthode d'estimation que nous retenons est une méthode en panel à effets fixes qui permet de comparer, toutes choses étant égales par ailleurs, les montants d'investissements avant et après l'adhésion. Notre échantillon comprend au total vingt pays de l'OCDE (dont 13 pays de l'UE). Nous mettons en évidence un certain nombre de déterminants "classiques" de l'investissement étranger, qui sont autant de variables de contrôle permettant de mesurer plus précisément l'effet sur l'investissement étranger de l'entrée dans l'UE et dans la zone euro. Ces déterminants comprennent la taille de marché (en niveau absolu et relativement par rapport aux autres pays), la volatilité du taux de change, le niveau des barrières tarifaires et des déterminants liés aux caractéristiques du marché du travail dans le pays hôte (niveau de capital humain, importance de la législation du travail, taux de syndicalisation et coût unitaire du travail).
Nous montrons tout d'abord qu'un pays qui adhère à l'UE bénéficie d'un surcroît d'investissements directs des membres de l'UE mais aussi des autres pays de l'OCDE. Ainsi, les dix nouveaux membres entrés en mai 2004 devraient connaître, toutes choses égales par ailleurs, un accroissement du montant d'investissements réalisés par les autres membres de l'UE de 34% en moyenne. Nous constatons ensuite que l'intégration monétaire, via la création d'une monnaie unique en Europe, engendre également un renforcement des investissements directs à la fois entre pays de la zone euro et en provenance de pays tiers. L'effet est là encore important, et il pourrait se généraliser à des pays qui décideront par la suite d'adopter l'euro.
Ces résultats nous engagent à penser que les huit PECO qui adhèrent à l'UE et qui devraient intégrer à terme la zone euro pourront bénéficier d'afflux d'IDE au cours des prochaines années. Ces investissements internationaux semblent aujourd'hui nécessaires pour pallier l'achèvement du processus de privatisation, et financer la croissance et l'emballement de leurs déficits courants.
Revenons aux deux études sur les IDE et l'élargissement, ou plus précisément sur l'impact de l'intégration économique et monétaire sur les IDE : toutes deux vont tester - en utilisant la méthode des panels - des relations expliquant les IDE par les variables classiques que sont la taille du marché d'accueil, les coûts du transport, les coûts relatifs des facteurs fixes, toutes ces variables correspondant à la forme réduite de deux "modèles" de multinationalisation des firmes, le modèle horizontal et le modèle vertical. A ces variables classiques vont s'ajouter des variables propres à l'élargissement, telles que les barrières tarifaires et la volatilité des taux de change d'un côté, les méthodes de privatisation et le régime de change de l'autre. F. Toubal utilise une base de données microéconomique sur les IDE allemands dans les dix PECO candidats. J. De Sousa et J. Lochard exploitent des données d'IDE de pays à pays, dans une perspective voisine du modèle gravitationnel. La première base est centrée sur des données spécifiques de l'élargissement alors que la seconde est plus large (IDE de vingt pays de l'OCDE vers tous les autres pays). Dans ce dernier cas, la méthode comparative va être mise au premier plan en comparant les effets sur les IDE des divers élargissements, particulièrement les deux derniers (Espagne et Portugal ; Finlande, Autriche et Suède). En résultat, si dans les deux études les variables classiques agissent dans le sens prévu et sont toutes significatives, par contre l'effet de l'élargissement reste ambigu. Dans l'étude De Sousa Lochard, la hausse des barrières tarifaires favorise les IDE (tariff jumping FDI) mais l'entrée d'un pays dans l'Union européenne joue dans le même sens, ce qui est contre-intuitif. De même, la volatilité des taux de change n'a pas d'effet sur l'IDE, mais l'adhésion à l'euro a pour effet de multiplier par deux les IDE. Dans l'étude Toubal, l'effet de l'élargissement est ambigu parce que l'attractivité des pays augmente : l'abaissement des barrières douanières favorise les IDE en élargissant leur marché potentiel ; mais les perspectives de rattrapage économique font augmenter le coût du travail, ce qui tend à réduire les IDE. Par contre, Toubal trouve que les régimes de changes fixes ont un impact positif sur les IDE, relativement aux changes flottants, et que cet impact est d'autant plus important que le régime de change est rigide.
F- Pour conclure
Les différentes contributions proposées dans ce numéro spécial permettent de formuler un ensemble de critiques à l'évaluation classique de l'élargissement de la politique monétaire européenne à l'Est de l'Europe. Selon cette dernière, l'Europe élargie n'est pas optimale parce que les chocs sont asymétriques et le travail rigide. D'une certaine manière, on retrouve cette vision que l'on pourrait qualifier de "pessimisme de l'intégration monétaire de l'Europe de l'Est" dans les positions adoptées par la BCE et la Commission : les nouveaux membres ne sont pas réellement mûrs, ils doivent montrer leur aptitude à "gagner" leur participation à la zone euro. Mais l'ensemble des contributions collectées dans la présente livraison tend à montrer que cette vision de l'euro comme couronnement ultime contredit la compréhension actuelle que l'on a des mécanismes de l'intégration. Une intégration monétaire renforcée - et à la limite une euroïsation précoce - est un moyen de la convergence réelle, pas une fin. Repousser l'adoption de la monnaie commune crée au contraire un danger en ménageant à la spéculation un champ d'action dans chacun des pays qui consacreront leurs efforts à défendre leur parité dans des conditions que la transition elle-même rend particulièrement difficiles. Babetski (dans ce numéro) qui prolonge Frankel et Rose (1998), comme Maurel à la suite de Mc Kinnon (1997), suggèrent que l'intégration commerciale augmente la symétrie des chocs, c'est-à-dire que les critères de Mundell sont endogènes et qu'il faut les évaluer ex post. D'autre part l'intégration financière qui accompagne l'intégration économique et monétaire a deux conséquences : elle réduit la marge de manœuvre laissée à la politique monétaire, c'est-à-dire le coût d'opportunité lié au renconcement à un instrument d'absorption des chocs asymétriques. Le gain associé aux changes fixes est celui d'un accès plus large au marché du capital européen, dont les investissements directs étrangers sont une composante (Toubal et De Sousa et Lochard dans ce numéro, voir aussi Michal Brzozowski (2004)). Enfin, Belke montre que l'adoption de change fixe se substitue à la flexibilité des marchés du travail ; l'euroïsation se substitue à la flexibilité du travail comme instrument de compensation des chocs asymétriques.
Si l'on définit une union monétaire comme un ensemble de pays liés par un niveau d'intégration monétaire et financière qui endogénéisent les chocs (en les rendant plus symétriques), qui rendent le financement de la croissance plus aisé, et qui compensent l'absence de flexibilité des facteurs de production, le travail notamment, on aboutit à la conclusion explicite dans Coriccelli et alii (dans ce numéro) que le choix du régime de change optimal dans ces économies émergentes et vulnérables aux chocs spéculatifs est l'euroïsation. Contrairement aux approches plus classiques qui mettent l'accent sur la nécessité de maintenir des politiques économiques indépendantes pour encadrer les processus de convergence réelle et nominale, ce numéro spécial montre que la possibilité offerte aux pays candidats d'entrer dans l'UEM fait de toutes les autres stratégies des second best. Il donne un écho à la récente livraison d'articles du CASE (Centre d'analyse sociale et économique, Varsovie) sur l'élargissement, dans lequel Maryla Maliszewska et Wojciech Maliszewski (2004) rappellent que les tests empiriques ne parviennent pas à mettre en évidence un lien statistique significtaif entre des régimes de change plus flexibles et la croissance ; Przemek Kowalski (2004) démontre que les régimes de change fixe ont été plus performants, tant du point de vue de la désinflation ou de la convergence nominale que de la convergence réelle. Comme Belke dans ce numéro, il ajoute que l'absence de flexibilité externe est une bonne chose car elle incite à plus flexibilité interne et à une modification des institutions qui va dans ce sens ; Dans une discussion sur la tentation de dévaluer avant l'entrée dans l'UEM, Mateusz Szczurek (2004) indique la supériorité à cet égard des currency boards, qui en outre sont associés à de meilleurs résultats en termes de convergence nominale et de croissance.
Pour que la stratégie d'euroïsation soit possible et que les pays candidats passent directement à l'étape 3 décrite au début de cette introduction, il faut qu'ils "réalisent un degré élevé de convergence économique durable", évalué au moyen de critères de Maastricht reformulés. L'inflation ne peut pas être maintenue en deça de la barre augmentée de 1,5% des trois meilleures performances d'une zone euro dont le taux de croissance moyen n'excède pas 3%, il faut tolérer des inflations qui correspondent au rattrapage du niveau des prix, et surveiller l'émission de crédits intempestifs; Le déficit public peut être maintenu dans la limité des 3% du PIB et la dette publique rester inférieure à 60% du PIB, si la croissance est financée par des capitaux privés venant d'Europe de l'Ouest ; Les taux d'intérêt à long terme ne doivent pas s'écarter "trop" des trois meilleures performances de l'Eurozone, ce qui devrait être facilité dans l'union monétaire élargie par la suppression la prime de risque et la prime liée à l'incertitude du change (sur ce point, voir Frankel, 1992) ; Le respect des marges de fluctuation (sans dévaluation ni réévaluation) du mécanisme de change pendant une durée de deux ans au moins n'est pas une condition très restrictive, puisqu'elle est observée de facto dans les pays qui ont des currency boards à la fin des années quatre vingt dix ou des ancres nominales fixes au début de la période. En somme, ce "degré élevé de convergence économique" n'est pas la condition pour l'adoption de l'euro, mais la conséquence de l'entrée dans une zone monétaire prospère.
Bibliographie
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Notes
[1] Selon les critères d'adhésion, le pays candidat doit avoir : (a) des institutions stables garantissant la démocratie, l'état de droit, les droits de l'homme et le respect des minorités ; (b) une économie de marché viable ainsi que la capacité de faire face à la pression concurrentielle à l'intérieur de l'Union ; (c) la capacité d'assumer les obligations de l'adhésion, y compris l'adhésion aux objectifs de l'union politique, économique et monétaire.
[2] En résultat d'un Conseil européen tenu également à Copenhague en décembre 2002
[3] Cependant, en 1986, le taux de chômage en Espagne était de 21% de la population active et la population travaillant dans le secteur agricole de 16% (respectivement 12% et 22% pour le Portugal). En 2002, dans les dix pays adhérents le taux de chômage était en moyenne de 14% et l'emploi agricole de 15% de la population active (Eurostat 2004).
[4] L'importance de la capacité administrative des pays candidats de mettre en œuvre l'acquis communautaire a fait l'objet d'un Conseil européen en juin 2000 : ceci signifie que non seulement les législations des pays candidats ont du être alignées sur celles des états-membres, mais encore que l'appareil administratif (et implicitement judiciaire) de contrôle de l'exécution au quotidien et de mise à jour permanente des réglementations fonctionne effectivement. Il est assez remarquable que des pays réputés au départ pour leur faiblesse institutionnelle aient pu franchir cet obstacle dans un délai de deux ans et demi.
[5] Jan Fidrmuc (2004), dans un numéro spécial à paraître dans le Journal of Comparative Economics en juin 2004 et coordonné par Mathilde Maurel et Jan Fidrmuc, montre que cette flexibilité ne se traduit pas par des migrations significatives des régions sinistrées vers les régions prospères. Sandrine Cazes et Alena Nesporova (2004) corroborent ce diagnostic de marchés du travail atypiques dans les pays adhérents, qui sont plus flexibles mais où le renforcement de la législation sur la protection de l'emploi se traduit par des effets favorables sur l'emploi.
[6] La plupart de ces contributions ont fait l'objet d'une conférence internationale organisée par le ROSES à la Maison des Sciences Economiques de l'Université Paris 1 les 5 et 6 juin 2003.
[7] Cette "feuille de route" de l'UEM est établie conjointement par la Commission et la Banque centrale européenne.
[8] Le problème similaire s'est posé quand, en 1979, l'Irlande a quitté son currency board ancré sur la livre sterling et a adhéré au SME 1.
[9] Sur la soutenabilité des cours pivots, voir Amina Lahrèche-Révil (2004), qui distingue les petits pays déjà en change fixe et concernés à ce titre par l'élargissement monétaire, des grands pays accédants pour lesquels la définition d'un cours pivot est essentielle.
[10] Définis au Conseil de Maastricht pour les états-membres en 1992 et étendus aux pays-candidats lors du Conseil européen de Madrid en 1995.
[11] Règle qui n'est plus respectée par la France et l'Allemagne
[12] C'est actuellement le cas de la Suède, qui ne dispose pas de la clause " opt out " comme le Royaume Uni et le Danemark, mais qui déroge cependant à la règle qui veut que l'adoption de l'euro soit liée à l'adhésion à l'Union européenne.
[13] Tout en ayant accepté que certains pays (ou régions) de l'Europe du Sud-Est aient déjà adopté l'Euro(Monténégro et Kosovo, voir Duchêne, 2000).
[14] Feige (2003, pages 363 and 366) évalue l'euroïsation comme le pourcentage de la monnaie étrangère sur la monnaie totale, qui va de six pourcent en Hongrie à trente cinq et quarante et un pourcent respectivement en Croatie et en Bulgarie.
[15] Pour un jugement très critique sur la position de la BCE, voir Nuti (2002).
[16] Nuti (2002, pp 419-444), suggère trois explications : 1) la crainte que l'euroïsation unilatérale par des pays faibles déstabilise l'euro. 2) la crainte que des pressions politiques ne s'exercent sur la BCE pour qu'elle prenne en compte les besoins spécifiques des pays euroïsés. 3) la crainte que le taux de change d'euroïsation unilatérale soit trop sous-évalué et menace la compétitivité des exportations européennes.
[17] Sur ce point de vue, voir Aglietta, Baulant, Moatti (2004).
[18] Pour une présentation de l'historique des régimes de change au cours de la transition, voir Coudert et Yanitch (2002).
[19] Dans les pays qui ont fait fonctionner un crawling peg, le taux de croissance du taux de change (fixé par la banque centrale) a été réduit au fur et à mesure de la baisse de l'inflation. Dans certains cas, le peg était devenu pratiquement fixe.
[20] Ainsi, les prix des services publics (par exemple les transports en commun) nécessitaient-ils de très fortes hausses afin de réduire les subventions dont ces services bénéficiaient dès avant la transition. En ce qui concerne l'observation des différentiels de prix, il faut mettre en garde contre une utilisation abusive de certaines données : la comparaison des prix locaux aux prix de l'UE est établie par l'inverse du ratio ERDI (exchange rate deviation index), qui est le rapport du taux de change du marché au taux de change de PPA.
[21] En partant du début de l'année 1993. En cinq ans, de 1993 à 1997, les prix ont été multipliés approximativement par 5 ; pendant les cinq années suivantes, ils ont encore augmenté de 27%
[22] Le fait que les inflations des pays émergents membres de l'Union monétaire européenne soient supérieures à la moyenne des trois plus basses inflations est tout à fait légitime, lorsqu'elles correspondent à des gains de productivité ; Toute la difficulté est sans doute d'en faire la démonstration. Coricelli, Jazbec et Masten suggèrent par ailleurs dans ce numéro que la politique monétaire développée dans les pays candidats engendre un niveau d'inflation supérieur à ce qu'il serait dans le cas de l'euroïsation.
[23] L'étude de Nicoletti, Scarpetta et Boylot (1999) ne concerne que la Pologne, la Hongrie et la République tchèque, qui sont membres de l'OCDE. Sur le lien entre caractéristiques des marchés du travail dans les pays candidats et régimes de change, voir aussi Babetski, 2002.
[24] Sur la fiabilité des données fiscales dans les pays adhérents, voir Halpern, Neményi (2001).
[25] Voir aussi R. McKinnon (2002).
[26] Voir également Babetski, Boone, et Maurel, 2004.