l'indice du BIP 40
Le BIP 40
En partant de l'idée que la « santé sociale » mérite un indice synthétique au même titre que la santé boursière ou économique, que des économistes et statisticiens professionnels français, associés à un réseau associatif militant pour la réduction des inégalités, le RAI (réseau d'alerte sur les inégalités), ont mis au point le BIP 40. Le RAI est un collectif français constitué de membres d''organisations syndicales (dont la fédération des finances CGT, le SNUI, la CFDT - Banque de France), d'associations de lutte contre les différentes formes d'exclusion (telles Droit au logement - Dal, Agir ensemble contre le chômage - AC!, Points Cardinaux, Raisons d'Agir ou le Groupe d'information et de soutien des immigrés - Gisti), d'universitaires, de chercheurs, d'économistes et hauts fonctionnaires qui ensemble travaillent à la dénonciation des mécanismes producteurs et reproducteurs des inégalités et de la pauvreté en France.
Le BIP 40, présenté à la presse en 2002 fait une référence ironique au PIB et au CAC 40.
Cet indicateur cherche à couvrir plusieurs dimensions des inégalités et de la pauvreté, de construire pour chaque dimension un indicateur (synthétisant lui-même plusieurs indicateurs) permettant de suivre l'évolution dans le temps des inégalités correspondantes et enfin d'agréger ces indicateurs par dimension pour obtenir un indicateur global (le BIP 40).
Les indices du BIP 40
L'indice emploi et travail est construit à l'aide de vingt-quatre indicateurs répartis en quatre groupes :
- un indice relatif aux conditions de travail mesuré par la part du travail le dimanche, part du travail de nuit, taux de fréquence des accidents du travail avec arrêt, durée moyenne des arrêts de travail pour accident, taux de fréquence des accidents mortels, nombre de maladies professionnelles reconnues, pénibilité, travail répétitif,
- un indice de chômage mesuré par le taux de chômage BIT, taux de chômage « complémentaire » au chômage officiel, ratio taux de chômage Homme/Femme, ratio taux de chômage <25 ans/25-49 ans, ratio taux de chômage cadres/employés, ratio taux de chômage cadres/ouvriers, part des chômeurs de longue-durée dans les chômeurs, part des chômeurs indemnisés,
- un indice de précarité mesuré par le taux de temps partiel, taux d'intérim, taux de contrat à durée déterminée (CDD), part des femmes dans le temps partiel et taux de sous-emploi,
- un indice portant sur les relations professionnelles mesuré par le nombre de journées de grève rapportées à la population salariée occupée, la part des votes aux comités d'entreprises allant à des candidats non-syndiqués et la part des salariés protégés licenciés dans les salariés licenciés.
L'indice revenus est construit à l'aide de quinze indicateurs répartis en quatre groupes :
- un indice de salaires mesuré par l'écart inter-déciles, ratios de salaires hommes-femmes et ratio 26-30 ans par rapport aux 41-50 ans, part des salaires dans l'ensemble des salariés, SMIC mensuel net par rapport au salaire moyen à temps complet,
- un indice de la consommation mesuré par l'indice de pouvoir d'achat, taux de surendettement des ménages, taux d'incidents de crédits,
- un indice des inégalités de revenus et de fiscalité mesuré par la part des revenus financiers dans le revenu disponible brut des ménages, part des salaires dans la valeur ajoutée, part des foyers soumis à l'impôt sur la fortune dans les foyers déclarant l'impôt sur le revenu et part de l'impôt sur le revenu dans les recettes fiscales.
- et un indice de la pauvreté mesuré par le revenu garanti moyen (défini par la moyenne pondérée des minima sociaux existants) rapporté au revenu disponible moyen, nombre d'allocataires de minima sur le nombre de ménages, part de la population vivant des minima sociaux, part des prestations sociales dans le revenu disponible brut des ménages.
L'indice santé est construit à l'aide de cinq indicateurs: l'espérance de vie à la naissance, la différence d'espérance de vie entre cadres et ouvriers, la part des dépenses de santé dans le produit intérieur brut, la part des dépenses de santé prise en charge par les ménages et la disparité des densités médicales régionales.
L'indice éducation est construit à l'aide de cinq indicateurs : l'accès au baccalauréat, les sorties du système éducatif, les inégalités de niveau en Français et en mathématiques, la proportion d'enfants de cadres par rapport aux enfants d'employés dans les CPGE.
L'indice logement est construit à l'aide de cinq indicateurs: le poids des dépenses de logement dans la consommation des ménages, l'indice du prix des loyers rapportés à l'indice des prix à la consommation, la part des mises en chantier aidées (PLA) dans les mises en chantier, la part du montant d'aides personnelles au logement dans la consommation de logement et le nombre de plaintes en justice des bailleurs pour impayés de loyers.
L'indice justice est construit à l'aide de quatre indicateurs : le taux d'incarcération, le taux de détention provisoire, la part des condamnés à des peines de plus de cinq ans et le taux de reconnaissance des demandes de statut de réfugiés.
L'évolution de l'indice global entre 1980 et 2004 permet d'observer que les inégalités en France sont sensiblement plus importantes en fin de période. Les données indiquent que la dégradation de la situation a été particulièrement marquée pour la dimension « travail et emploi », que les indices synthétiques en matière de revenus, de santé et d'éducation ont été assez stables, mais que les inégalités ont progressé en matière de logement et de justice. Il est par ailleurs possible d'affiner l'analyse pour chacune des six composantes de l'indicateur. Ainsi, on observe que s'il n'y a pas de dégradation globale de l'indicateur synthétique de santé, c'est notamment parce que la progression constante de l'espérance de vie contrebalance une inégalité qui s'accentue depuis le début des années 1980, à savoir l'écart d'espérance de vie entre les cadres et les ouvriers.